Le Pouvoir Revient aux Fondateurs en 2025
Imaginez un monde où les entrepreneurs dictent les termes de leurs levées de fonds, où les investisseurs se bousculent pour convaincre plutôt que pour imposer. Ce scénario, qui semblait utopique il y a encore quelques années, devient réalité en cette fin 2025. Le marché du venture capital a opéré un virage spectaculaire, redonnant le pouvoir aux fondateurs de startups.
Un basculement historique du marché du venture capital
Après les années fastes de 2021 suivies d’un marché baissier impitoyable en 2022-2023, où les investisseurs tenaient fermement les rênes, la dynamique s’est inversée. Aujourd’hui, les capitaux sont à nouveau abondants et les bons projets se font rares. Les VCs, ces investisseurs en capital-risque, doivent désormais séduire les entrepreneurs plutôt que l’inverse.
Cette transformation n’est pas seulement anecdotique. Elle modifie en profondeur la manière dont se construisent les relations entre fondateurs et investisseurs. Les entrepreneurs, conscients de leur nouvelle force, deviennent plus sélectifs. Ils ne cherchent plus seulement des chèques, mais de véritables partenaires capables de les accompagner sur le long terme.
Les leçons tirées par les investisseurs eux-mêmes
Deux figures du secteur illustrent parfaitement cette évolution : Leslie Feinzaig de Graham & Walker et Ross Fubini de XYZ Venture Capital. Tous deux ont vécu l’expérience difficile de lever leur premier fonds, une épreuve qui leur a donné une empathie rare pour les fondateurs qu’ils accompagnent aujourd’hui.
Leslie Feinzaig raconte avoir dû pitcher des centaines de fois pour constituer son fonds, principalement auprès d’investisseurs individuels. Sans réseau établi dans le milieu, elle a dû miser entièrement sur sa personnalité et sa vision.
Si vous n’avez pas de track record, ce qu’ils investissent, c’est vous. C’est comme lever une énorme ronde d’angel sans lead.
– Leslie Feinzaig, Graham & Walker
Cette expérience l’a transformée en une alliée précieuse pour les entrepreneurs. Elle est devenue cette personne de confiance auprès de qui les fondateurs répètent leur pitch avant de l’affronter devant leur conseil d’administration.
Comment choisir le bon investisseur ? La méthode en trois piliers
Ross Fubini propose une approche structurée pour évaluer les investisseurs potentiels. Selon lui, trois critères doivent guider le choix des fondateurs : la personne, le fonds, et les termes du deal.
Le premier critère, et de loin le plus important, concerne l’humain derrière l’investisseur. Travailler avec un VC, c’est s’engager pour de nombreuses années. La compatibilité personnelle est donc essentielle.
Vous travaillez avec cette personne pour toujours. Est-ce quelqu’un d’amusant ? Faites-vous confiance ? A-t-il l’énergie pour faire aboutir le deal ?
– Ross Fubini, XYZ Venture Capital
Au-delà de la personnalité, il faut examiner la solidité du fonds et sa capacité à soutenir l’entreprise sur la durée. Enfin, les termes financiers doivent être équitables. Un mauvais deal, même avec un excellent investisseur, peut empoisonner la relation future.
Pourquoi ce retournement est une bonne nouvelle
Ross Fubini qualifie cette nouvelle dynamique de “thrilling”, excitante. Dans ce marché plus favorable aux fondateurs, les décisions se prennent plus rapidement. Les deals avancent vite quand la confiance mutuelle est établie.
Cette rapidité contraste fortement avec les années de marché baissier, où chaque terme était négocié âprement et où les valorisations plongeaient. Aujourd’hui, l’enthousiasme est de retour, et avec lui une certaine joie dans les transactions.
Pour les fondateurs, cette situation offre une opportunité unique : construire un cap table réfléchi, avec des investisseurs qui partagent vraiment leur vision. Un mauvais choix peut coûter cher sur le long terme, alors que le bon partenaire devient un atout décisif.
Les stratégies qui fonctionnent encore (et celles qui ne marchent plus)
Les méthodes traditionnelles de prospection ont perdu de leur efficacité. Les pitch decks envoyés à froid ou les emails impersonnels ne suffisent plus. Ce qui compte désormais, c’est l’authenticité et la capacité à démontrer sa valeur par les actes.
Les investisseurs comme Leslie Feinzaig et Ross Fubini misent sur la construction de relations genuines. Ils se positionnent comme des partenaires fiables, capables d’apporter bien plus que du capital : conseils stratégiques, réseau, expérience.
- Privilégier les rencontres informelles et les recommandations
- Démontrer sa valeur ajoutée sur des deals précédents
- Être transparent sur sa stratégie d’investissement
- Cultiver une réputation d’investisseur fair et soutenant
Du côté des fondateurs, la sélectivité est de mise. Il ne s’agit plus de prendre le premier chèque venu, mais de construire une équipe d’investisseurs cohérente et complémentaire.
Ce que cela signifie pour l’écosystème startup en 2026
Ce basculement pourrait avoir des conséquences profondes sur l’ensemble de l’écosystème. Les projets les plus solides, portés par des équipes talentueuses, attireront les meilleurs investisseurs. Les valorisations devraient se stabiliser à des niveaux plus raisonnables qu’en 2021, mais rester attractives.
On peut s’attendre à une maturation du marché : moins de deals précipités, plus de partenariats réfléchis. Les investisseurs seront incités à mieux accompagner leurs portfolio companies, sous peine de se voir écartés des prochaines opportunités.
Pour les nouveaux entrants dans le venture capital, la barre est plus haute. Sans track record établi, lever un fonds reste un défi immense, comme l’a vécu Leslie Feinzaig. Seuls ceux qui parviennent à démontrer une vraie valeur ajoutée pour les fondateurs réussiront.
Conseils pratiques pour les fondateurs en levée
Si vous préparez une levée de fonds dans ce nouveau contexte, voici quelques recommandations issues de l’expérience de ces investisseurs :
- Prenez le temps d’évaluer la personne avant le fonds
- Demandez des références à d’autres fondateurs du portfolio
- Testez l’investisseur sur des scénarios concrets
- Négociez des termes qui préservent votre contrôle
- Construisez un tour de table diversifié et complémentaire
Le marché a changé, mais les fondamentaux restent. Un bon investisseur est celui qui vous aide à bâtir une entreprise durable, pas seulement celui qui signe le plus gros chèque.
Cette nouvelle ère marque peut-être la fin d’une période d’excès pour entrer dans une phase plus mature et équilibrée du venture capital. Les fondateurs ont regagné leur pouvoir d’antan, et avec lui la responsabilité de choisir sagement leurs alliés. L’avenir des startups s’annonce d’autant plus prometteur qu’il repose désormais sur des partenariats solides et authentiques.
Dans ce paysage renouvelé, une chose est certaine : les relations humaines redeviennent au cœur du jeu. Et c’est peut-être la meilleure nouvelle pour tout l’écosystème.