L’échec d’un projet innovant d’isobutène biosourcé
Les projets ambitieux d'industrialisation des biotechnologies se heurtent parfois à des obstacles de taille. C'est le cas de Global Bioenergies, qui vient d'annoncer l'abandon de son projet d'usine d'isobutène biosourcé destiné au marché des cosmétiques. Retour sur les défis de la transition vers une bioéconomie à l'échelle industrielle.
Un scale-up compromis par des difficultés de financement
Malgré des avancées prometteuses, Global Bioenergies n'est pas parvenu à réunir les investissements nécessaires pour concrétiser son projet d'unité de production de 2 500 tonnes d'isobutène par an. Cette décision illustre les obstacles auxquels font face les startups innovantes dans le domaine des biotechs lorsqu'il s'agit de passer à l'échelle industrielle.
Le PDG Marc Delcourt a déclaré dans un communiqué :
Global Bioenergies regrette la non concrétisation de ce projet et en tire les conséquences : la société ne portera donc pas de projet d'usine en propre à court ni moyen terme, et focalisera tous ses efforts vers un modèle de partenariats.
– Marc Delcourt, Directeur Général de Global Bioenergies
Un virage stratégique vers les biocarburants aériens
Suite à cette décision, Global Bioenergies compte recentrer ses efforts sur les applications de sa technologie pour la production de carburants d'aviation durables (SAF). La société mise désormais sur un modèle de partenariats industriels pour atteindre ses objectifs dans ce secteur porteur.
En effet, le marché des SAF devrait connaître une forte accélération dans les années à venir, avec notamment :
- L'objectif européen d'incorporer 6% de SAF dans les réservoirs des avions d'ici 2030, soit environ 3 millions de tonnes par an.
- Le "Grand Challenge" américain visant une production de 9 millions de tonnes de SAF par an à l'horizon 2030.
Global Bioenergies entend bien prendre part à cette dynamique grâce à son procédé certifié ASTM, qui fait partie des rares solutions viables pour la production de biocarburants aériens.
Maintien d'une production à petite échelle pour la cosmétique
Malgré l'abandon du projet d'usine dédié, Global Bioenergies n'entend pas délaisser complètement le marché de niche des ingrédients biosourcés pour la cosmétique. La société compte s'appuyer sur son unité pilote de Pomacle dans la Marne pour continuer à produire de l'isododécane biosourcé à destination de ce secteur.
Les biotechs face au défi de l'industrialisation
Au-delà du cas de Global Bioenergies, ce revers met en lumière les difficultés rencontrées par de nombreuses startups issues des biotechnologies industrielles. Le passage de la R&D à la production à grande échelle représente souvent un cap critique, qui nécessite des investissements conséquents et une gestion fine des risques.
Pour réussir cette transition, plusieurs facteurs clés entrent en jeu :
- La robustesse et la compétitivité des procédés à l'échelle industrielle
- L'accès à des financements adaptés, combinant capitaux publics et privés
- La sécurisation des approvisionnements en biomasse durable
- La mise en place de partenariats stratégiques avec des acteurs industriels
Au-delà des biotechs elles-mêmes, c'est tout l'écosystème de soutien à l'innovation - pouvoirs publics, investisseurs, industriels - qui est appelé à se mobiliser pour accompagner l'émergence d'une bioéconomie compétitive et durable. Des défis de taille, mais aussi des opportunités majeures pour bâtir un nouveau modèle de développement en phase avec les enjeux du 21ème siècle.