L’Enquête du Régulateur Britannique sur l’Accord Microsoft-Inflection AI
L'intelligence artificielle générative est sur toutes les lèvres en ce moment, mais son développement fulgurant soulève aussi des inquiétudes. C'est dans ce contexte que l'autorité britannique de la concurrence, la Competition and Markets Authority (CMA), vient d'annoncer l'ouverture d'une enquête sur l'accord entre le géant technologique Microsoft et la start-up d'IA Inflection AI. Zoom sur les enjeux de cette investigation.
Microsoft-Inflection AI : un accord qui interpelle
En mars dernier, Mustafa Suleyman, cofondateur de la start-up Inflection AI, a annoncé son départ pour rejoindre Microsoft et y diriger une nouvelle division dédiée à l'IA grand public. Dans la foulée, la majorité de l'équipe d'Inflection AI, soit environ 70 personnes dont la scientifique en chef Karen Simonyan, a également rallié les rangs de la firme de Redmond.
Mais le plus intriguant réside dans les coulisses financières de cette opération. Selon Reuters, Microsoft aurait accepté de verser environ 650 millions de dollars en cash à Inflection AI. En contrepartie, le géant technologique pourra exploiter les modèles d'IA générative développés par la start-up. Un arrangement pour le moins inhabituel qui a éveillé la curiosité des régulateurs.
La CMA britannique ouvre une enquête de « phase 1 »
Estimant disposer de suffisamment d'éléments, la CMA vient donc de notifier l'ouverture d'une enquête dite de « phase 1 ». L'objectif : déterminer si cet accord Microsoft-Inflection AI est assimilable à une fusion susceptible de porter atteinte à la concurrence sur le marché britannique de l'IA générative.
La CMA précise qu'elle rendra sa décision d'ici au 11 septembre prochain. Deux issues sont alors possibles :
- Soit l'accord est jugé non problématique et l'enquête s'arrête là.
- Soit des doutes persistent sur ses effets anticoncurrentiels, et l'affaire passera alors en « phase 2 » pour une investigation approfondie d'environ 6 mois.
Une enquête également ouverte aux États-Unis
La CMA n'est pas la seule à se pencher sur ce dossier. Outre-Atlantique, la Federal Trade Commission (FTC) a aussi annoncé début juin l'ouverture d'une enquête sur l'accord Microsoft-Inflection AI. Comme son homologue britannique, le gendarme américain de la concurrence cherche à savoir si cette opération pourrait indûment restreindre la concurrence sur le bouillonnant marché de l'IA générative.
L'IA générative, nouveau terrain de chasse des géants de la Tech
Cette double enquête illustre bien les enjeux concurrentiels qui se cristallisent autour de l'IA générative. Avec l'engouement suscité par des agents conversationnels comme ChatGPT (OpenAI) ou Claude (Anthropic), les géants de la Silicon Valley sont plus que jamais à l'affût pour renforcer leurs actifs dans ce domaine ultra-stratégique.
Microsoft, déjà étroitement lié à OpenAI, semble avoir flairé le potentiel des modèles développés par Inflection AI. Avec cet accord, la firme de Redmond pose une nouvelle pièce maîtresse dans sa stratégie IA, quelques mois après avoir investi massivement dans OpenAI. Reste à savoir si les régulateurs y verront une manœuvre anticoncurrentielle ou non. Affaire à suivre, donc.
Vers une régulation plus stricte de l'IA ?
Plus largement, ces enquêtes s'inscrivent dans un contexte de réflexion croissante sur la régulation de l'IA. Face à la rapidité des avancées dans ce domaine, de nombreuses voix s'élèvent pour appeler à un encadrement plus strict, afin de prévenir dérives et abus.
Nous devons trouver le juste équilibre entre ne pas freiner l'innovation et s'assurer que ces technologies puissantes bénéficient à la société dans son ensemble.
Margrethe Vestager, Commissaire européenne à la Concurrence
L'Europe est d'ailleurs en train de plancher sur un ambitieux règlement, l'AI Act, pour encadrer le développement et l'utilisation de l'IA. De leur côté, les régulateurs antitrust scrutent de près les mouvements des géants de la Tech dans ce secteur, pour prévenir toute atteinte à la concurrence. Microsoft est prévenu.
