L’enquête pointe une interférence externe dans le crash aérien
Les circonstances exactes du drame aérien survenu le jour de Noël au Kazakhstan s'éclaircissent peu à peu. Le 25 décembre dernier, un Embraer d'Azerbaïdjan Airlines assurant la liaison entre Bakou et Grozny s'est écrasé près de la ville d'Aktau, faisant 38 morts parmi les 62 passagers et 5 membres d'équipage. Alors que l'enquête progresse, la compagnie aérienne a lâché une bombe ce vendredi 27 décembre : l'accident serait dû à "une interférence physique et technique externe".
Le vol dérouté de sa trajectoire initiale
Les premiers éléments de l'enquête révèlent en effet que l'appareil a brutalement changé de cap alors qu'il survolait le sud de la Russie, une zone où les systèmes de défense antiaérienne de Moscou sont régulièrement sollicités ces derniers mois pour contrer des attaques de drones ukrainiens à longue portée. Le vol J2-8243 a ainsi traversé la mer Caspienne avant de s'écraser au Kazakhstan, à l'opposé de sa route prévue.
Selon quatre sources azerbaïdjanaises proches de l'enquête citées par Reuters, l'avion aurait été abattu par erreur par un missile russe. L'une d'elles affirme plus précisément que l'Embraer a été touché par un tir de Pantsir-S, un système de défense antiaérienne russe, tandis que ses communications étaient brouillées par l'armée russe à l'approche de Grozny. Interrogé sur ces accusations, le Kremlin se borne à déclarer que des investigations sont en cours.
Des attaques de drones dans la région
Le contexte régional est en effet tendu. Selon Osprey Flight Solutions, société spécialisée dans la sécurité aérienne, les républiques russes du Daguestan et de Tchétchénie ont été la cible d'attaques de drones ukrainiens ces derniers mois, déclenchant des ripostes de la défense antiaérienne russe.
L'agence russe de l'aviation civile Rosaviatsia confirme de son côté que le pilote s'est dérouté après deux tentatives d'atterrissage infructueuses à Grozny en raison d'un épais brouillard et d'une alerte aux drones "terroristes". Plusieurs aéroports de dégagement lui auraient été proposés, mais il a finalement opté pour Aktau au Kazakhstan.
Le témoignage glaçant des rescapés
Soubhonkoul Rakhimov, l'un des miraculés de la catastrophe, raconte avoir entendu "au moins une grosse détonation" lors de l'approche sur Grozny. "J'ai cru que l'appareil allait éclater en morceaux", confie-t-il depuis son lit d'hôpital, ajoutant avoir commencé à prier. Une autre rescapée, Vafa Chabanova, évoque pour sa part "deux détonations" suivies d'un problème de dépressurisation dans la cabine.
Le commandant nous a dit qu'on lui avait recommandé un amerrissage mais il a décidé de faire route vers Aktau pour poser l'avion sur la terre ferme. Il nous a prévenus que l'atterrissage serait brutal, nous a demandé de nous tenir prêts et de préparer les passagers.
– Zoulfougar Assadov, steward à bord du vol
Des images du site du crash diffusées sur les réseaux sociaux et vérifiées par Reuters montrent d'ailleurs des éclats de missile sur la queue de l'appareil. Face à ces éléments troublants, Azerbaïdjan Airlines a décidé de suspendre ses vols vers sept villes russes.
Un drame qui soulève de nombreuses questions
Si l'hypothèse d'un tir ami de la défense antiaérienne russe se confirme, cet accident tragique en dit long sur la confusion qui règne dans le ciel russe, entre menaces de drones ukrainiens et trafic aérien civil. Il met aussi en lumière les risques liés au déploiement de systèmes d'armes sophistiqués dans des zones densément fréquentées.
De nombreuses zones d'ombre demeurent cependant à ce stade. Pourquoi le contrôle aérien russe a-t-il perdu le contact avec l'avion ? Les systèmes de défense ont-ils été déclenchés par erreur ou l'appareil a-t-il été pris pour cible délibérément ? Quelles mesures sont prises pour sécuriser l'espace aérien de la région ?
Autant de questions auxquelles devra répondre l'enquête, dont les conclusions sont attendues non seulement par les familles des victimes mais aussi par l'ensemble du secteur aérien, soucieux de tirer les leçons de ce drame pour renforcer la sécurité des vols. Car au-delà du terrible bilan humain, c'est la confiance dans le transport aérien et sa capacité à opérer en toute circonstance qui est en jeu.