L’EPR2, le meilleur choix nucléaire pour la France ?
Tandis que la France mise gros sur la relance du nucléaire avec la construction de six nouveaux EPR2, le chiffrage de ce programme pharaonique fait l'objet d'intenses discussions entre EDF et le gouvernement. En parallèle, un récent rapport de la Cour des comptes sème le doute sur sa crédibilité. Dans ce contexte, les petits réacteurs modulaires (SMR) apparaissent comme une alternative séduisante. Mais l'EPR2 est-il vraiment le meilleur choix pour assurer l'avenir énergétique du pays ? Plongeons au cœur de ce débat crucial.
EPR2 : des surcoûts qui inquiètent
Selon des informations non officielles, le nouveau chiffrage du coût de construction des six premiers EPR2 serait bien supérieur aux estimations initiales. EDF aurait établi une facture dépassant largement les 51,2 milliards prévus en 2022, voire les 79,9 milliards évoqués par la Cour des comptes en mars 2024. Une situation qui fait tousser Bercy, alors que l'État doit financer ces réacteurs via un prêt à taux zéro.
Ces dérapages rappellent les déboires de l'EPR de Flamanville, dont le coût a été réévalué à 23,7 milliards d'euros. Mais aussi ceux des EPR construits en Chine, en Finlande et au Royaume-Uni. Un constat qui pousse la Cour des comptes à pointer un calendrier « instable » pour le programme EPR2, avec une mise en service du premier réacteur à Penly au mieux en 2038, soit 3 ans de retard.
Des alternatives limitées à l'international
Face à ces difficultés, peut-on envisager d'autres options que l'EPR2 d'EDF ? Un tour d'horizon international montre que tous les opérateurs peinent à tenir coûts et délais sur les réacteurs de forte puissance. Seule la Chine parvient à construire ses réacteurs Hualong en 68 mois. Mais miser sur la technologie chinoise ou russe n'est pas une option pour des raisons géopolitiques évidentes.
Miser sur les petits réacteurs SMR ?
Une autre piste serait de combiner un prolongement des réacteurs existants au-delà de 60 ans, un développement accru des renouvelables et la construction de petits réacteurs SMR. Ceux-ci permettraient de produire électricité et chaleur au plus près des besoins, notamment pour l'industrie et la production d'hydrogène.
Si aucun modèle de SMR n'a encore été validé par une autorité de sûreté, les projets se multiplient. En France, des start-up comme Naarea avancent leurs pions, avec des premières unités attendues dès 2030. L'option SMR pourrait permettre de développer un nouveau tissu industriel du petit nucléaire en Europe. Reste à chiffrer les coûts et à convaincre l'opinion.
Donner un cap clair au nucléaire français
Pour trancher le débat, une loi de programmation énergétique pourrait donner de la visibilité à la filière nucléaire française, afin de lancer les investissements et formations nécessaires. L'épineuse question du cycle du combustible nucléaire, dont les coûts n'ont pas été actualisés, devra aussi être mise sur la table.
Car si l'atome a de beaux jours devant lui en France, encore faut-il lui donner un cap clair et soutenable. C'est tout l'enjeu des décisions qui seront prises dans les mois à venir sur le futur de notre mix électrique. Un choix entre le mastodonte EPR2 et les agiles SMR qui engagera le pays pour des décennies.
Toutes les options restent sur la table jusqu'au vote d'une loi programmatique de souveraineté énergétique. Elle pourrait donner de la visibilité à la filière pour lancer les investissements et les formations nécessaires au-delà des fournisseurs de rang 1 d'EDF.
– Extrait de l'article de L'Usine Nouvelle
- L'EPR2 fait face à d'importants dérapages de coûts
- Les petits réacteurs SMR apparaissent comme une alternative crédible
- La France doit rapidement clarifier sa stratégie nucléaire
En somme, le nucléaire a encore un rôle clé à jouer dans la transition énergétique française. Mais le choix de la technologie – EPR2 ou SMR – sera déterminant pour en maîtriser les coûts et les délais. Un arbitrage crucial sur lequel le gouvernement devra rapidement trancher pour ne pas hypothéquer l'avenir énergétique du pays.