Les avancées prometteuses des ADC contre le cancer
Les anticorps conjugués, ou ADC pour "antibody-drug conjugate", représentent un nouvel espoir dans la lutte contre le cancer. Ces biomolécules sophistiquées combinent la spécificité des anticorps monoclonaux et la puissance cytotoxique de petites molécules de chimiothérapie. Résultat : une balle guidée anti-tumorale redoutablement efficace.
Le principe des ADC : une approche en plein boom
Les ADC sont constitués de trois éléments clés :
- Un anticorps monoclonal qui cible spécifiquement un antigène exprimé par les cellules cancéreuses.
- Un agent cytotoxique ultrapuissant qui peut détruire les cellules une fois libéré à l'intérieur.
- Un linker qui relie de façon stable l'anticorps et la molécule active.
L'anticorps se lie sélectivement à l'antigène cible surexprimé par les tumeurs. Une fois lié, le complexe est internalisé dans la cellule cancéreuse où le linker est clivé, libérant le médicament directement à l'intérieur pour un effet cytotoxique maximal. Les tissus sains peu ou pas dotés de l'antigène sont ainsi épargnés.
ADC et cibles à succès
La sélection de la cible antigénique est cruciale. Elle doit être fortement et sélectivement présente sur les cellules tumorales. Parmi les cibles des ADC en développement, on retrouve :
- HER2 (Trastuzumab deruxtecan - cancer du sein)
- TROP2 (Sacituzumab govitecan - cancer du sein triple négatif)
- PSMA (Talazoparib - cancer de la prostate)
Les ADC, un marché en pleine explosion
Le marché des ADC a le vent en poupe. Estimé à 5 milliards de dollars en 2021, il devrait atteindre plus de 30 milliards d'ici 2030 selon le cabinet GlobalData. Plus de 80 entreprises développent des ADC, dont une majorité de biotechs. Mais les grands laboratoires sont aussi de la partie, à l'image de Roche, Gilead, Pfizer, AstraZeneca ou Merck.
Les derniers développements cliniques
Déjà une quinzaine d'ADC ont décroché une autorisation de mise sur le marché. Et la dynamique s'accélère avec de nombreux candidats prometteurs en phases avancées de développement clinique :
AstraZeneca vient d'annoncer des résultats positifs de phase III pour son Truqap (capivasertib) dans le traitement du cancer de la prostate métastatique, en association avec d'autres médicaments. Cet ADC visant AKT a permis d'améliorer significativement la survie sans progression des patients.
Incyte mise sur une extension d'indication pour son Monjuvi (tafasitamab) dans le lymphome folliculaire récidivant/réfractaire. L'ADC anti-CD19, associé à d'autres molécules, a réduit de 57% le risque de progression dans un essai pivot de phase III.
Kelun Biotech, une biotech chinoise, a décroché en Chine l'AMM pour son Sacituzumab tirumotecan ciblant TROP2 dans le cancer du sein triple négatif métastatique. Une première sur ce marché, fruit d'un partenariat avec MSD qui le développe hors Chine.
Des défis à relever
Malgré des succès indéniables, les ADC doivent encore surmonter plusieurs obstacles, à commencer par leur complexité de développement et de production qui implique de concilier trois éléments (anticorps, linker, cytotoxique). Un savoir-faire pointu et coûteux. La conception de linkers toujours plus stables et spécifiques reste un défi, de même que la gestion des toxicités potentielles des cytotoxiques utilisés.
Le futur des ADC
Au-delà de l'oncologie, le champ des possibles pour les ADC est vaste et s'étend désormais à d'autres pathologies comme les maladies auto-immunes ou infectieuses. Ils pourraient aussi devenir des "cheval de Troie" pour délivrer d'autres classes thérapeutiques comme des ARN interférents ou des modulateurs protéiques. Les ADC n'ont pas fini de faire parler d'eux !