Les changements à la tête d’Atos et le plan de sauvetage
Le géant français des services informatiques Atos traverse une période de fortes turbulences. Après une succession de PDG ces deux dernières années, c'est au tour de Philippe Salle de prendre les commandes pour tenter de redresser l'entreprise via un plan de sauvetage impliquant les créanciers et l'État. Mais la tâche s'annonce ardue vu l'ampleur des défis à relever.
Un nouveau capitaine dans la tempête
Le conseil d'administration d'Atos a nommé mardi 15 octobre Philippe Salle comme nouveau président, qui deviendra également directeur général à partir de février prochain. Cet ancien patron d'Altran et du groupe Foncia aura la lourde tâche de restructurer l'entreprise et déployer son plan d'affaires, alors qu'Atos est sur le point d'être repris par ses créanciers.
Philippe Salle sera le 6ème directeur général en un peu plus de 2 ans, illustrant l'instabilité chronique au sommet d'Atos ces derniers temps. Il succède à Jean-Pierre Mustier, lui-même nommé en juillet dernier. Un turn-over qui en dit long sur l'ampleur de la crise traversée par l'entreprise.
La survie en jeu
Car c'est bien la survie d'Atos qui est en jeu. Croulant sous une dette de 4,8 milliards d'euros, le groupe a vu son avenir s'assombrir ces derniers mois. Malgré les marques d'intérêts de repreneurs potentiels comme le milliardaire tchèque Daniel Kretinsky ou le fondateur de Onepoint David Layani, aucune solution satisfaisante n'a émergé.
Face à l'urgence, les créanciers d'Atos ont fini par s'imposer. Réunis fin septembre, les actionnaires ont approuvé un plan de sauvegarde prévoyant une restructuration de la dette et une prise de contrôle par les créanciers. Un plan qui doit encore être validé par le tribunal de commerce de Nanterre.
Conversion de dette et nouveaux financements
Concrètement, les créanciers vont convertir 3,1 milliards d'euros de dette en actions, leur donnant une participation de 74 à 99% au capital. Une augmentation de capital de 233 millions d'euros est également prévue, à laquelle les actionnaires historiques pourront participer.
Débarrassé d'une partie de sa dette, Atos bénéficiera aussi de nouveaux financements pouvant atteindre 1,67 milliard d'euros de la part de ses créanciers pour financer son redressement. Mais vu l'ampleur des pertes (2 milliards sur le 1er semestre 2024), le pari est risqué.
L'État reprend les activités stratégiques
Signe de l'importance d'Atos, l'État va débourser 700 millions d'euros pour reprendre ses activités jugées stratégiques au côté de Thales. Cela concerne notamment :
- Les supercalculateurs utilisés pour les simulations nucléaires
- Les systèmes de communication des avions Rafale
- Les solutions de cybersécurité d'Atos
En séparant ces activités sensibles, l'objectif est d'assurer leur pérennité en cas d'échec du plan de sauvetage. Une garantie pour la souveraineté numérique française.
Un futur en pointillé
Malgré ce sauvetage in extremis, l'avenir d'Atos reste incertain. Avec un endettement encore élevé et des pertes abyssales, le redressement n'a rien d'acquis. Tout reposera sur l'exécution du plan et la capacité de Philippe Salle à renouer avec les bénéfices, dans un contexte économique difficile.
La restructuration d'Atos sera un test grandeur nature de la solidité du capitalisme français.
Challenges
Une chose est sûre : après avoir tutoyé les sommets, l'ex-fleuron tricolore des services IT joue désormais sa survie. Un naufrage qui coûtera cher à l'État et laissera des traces dans le paysage numérique français.