Les Droits de Douane de Trump: Incertitude Économique en Vue
Dans une déclaration lourde de conséquences, François Villeroy de Galhau, le gouverneur de la Banque de France, a tiré la sonnette d'alarme quant aux répercussions potentiellement désastreuses des nouveaux droits de douane imposés par le président américain Donald Trump sur les importations en provenance du Mexique et du Canada. Une décision qui risque d'accroître significativement l'incertitude pesant sur l'économie mondiale.
Trump joue avec le feu du protectionnisme
En imposant brutalement des droits de douane de 25% sur les importations de ses deux plus proches voisins et partenaires commerciaux, Donald Trump fait le pari risqué d'un protectionnisme à outrance. Une stratégie qui pourrait se retourner contre l'économie américaine elle-même selon Villeroy de Galhau :
C'est une décision qui a des conséquences négatives, d'abord pour l'économie américaine (...) Cela va désorganiser par exemple l'industrie automobile aux États-Unis. Donc, c'est mauvais aussi pour la croissance américaine.
François Villeroy de Galhau, gouverneur de la Banque de France
Le gouverneur met en garde contre les effets pervers du protectionnisme qui, malgré des apparences trompeuses, se révèle être un jeu à somme négative où tout le monde est perdant.
Escalade des tensions commerciales
Cette décision unilatérale de Washington intervient dans un contexte déjà tendu sur le plan du commerce international. Avec l'entrée en vigueur dès mardi de ces droits de douane, c'est une véritable guerre commerciale qui se profile à l'horizon, menaçant la stabilité des échanges mondiaux.
Donald Trump a indiqué qu'il s'entretiendrait ce lundi avec Justin Trudeau, le Premier ministre canadien, et Claudia Sheinbaum, la présidente mexicaine. Reste à voir si ces discussions de la dernière chance permettront d'apaiser les tensions ou si au contraire, elles ne feront que les attiser davantage.
L'Europe doit muscler son économie
Face à ces turbulences, l'Union européenne doit adopter une position ferme mais mesurée. Si François Villeroy de Galhau n'exclut pas des mesures de rétorsion ciblées pour ne pas rester "naïf ou désarmé", il insiste surtout sur la nécessité pour l'Europe de renforcer ses propres atouts :
Je crois que le coeur de la réponse européenne c'est de muscler davantage notre économie : innover plus vite (...), intégrer plus le marché unique (...) et investir mieux.
François Villeroy de Galhau, gouverneur de la Banque de France
Autant de chantiers essentiels pour permettre à l'Union de renforcer sa résilience et de peser dans le grand jeu des relations économiques internationales face aux ambitions hégémoniques des États-Unis ou de la Chine.
Un protectionnisme perdant-perdant
Plus largement, cette nouvelle escalade protectionniste initiée par l'administration Trump illustre les limites et les dangers d'une approche purement mercantiliste et conflictuelle des relations économiques. Une conception fondée sur un nationalisme étroit et une vision à court terme, où il s'agit d'obtenir des concessions en brandissant la menace de mesures de rétorsion, au mépris des effets systémiques sur l'économie mondiale.
À l'heure de la mondialisation et de l'interdépendance croissante des économies, une telle logique s'avère non seulement contreproductive mais potentiellement dévastatrice. En dressant des barrières toujours plus hautes, on entrave la libre circulation des biens, des services et des investissements qui est pourtant un moteur essentiel de la croissance et de la prospérité.
On risque ainsi de déclencher une réaction en chaîne incontrôlable, chaque pays étant tenté de surenchérir avec ses propres mesures de protection, dans une spirale destructrice de rivalités et de défiance mutuelle. Un scénario cauchemardesque qui n'est pas sans rappeler les heures sombres des années 1930 et la grande dépression déclenchée notamment par la politique protectionniste brutale des États-Unis (Loi Smoot-Hawley de 1930).
Un multilatéralisme rénové
Face à ces périls, il est urgent de réaffirmer la primauté d'un ordre international fondé sur des règles partagées, des institutions multilatérales fortes et des mécanismes efficaces de coopération et de règlement des différends. Le système commercial construit autour de l'OMC, malgré ses limites et ses imperfections, reste un rempart essentiel contre la loi du plus fort et l'unilatéralisme agressif.
Pour autant, ce système doit impérativement être rénové et adapté aux défis du 21e siècle, qu'il s'agisse du développement durable, de la révolution numérique, de la protection des droits sociaux et environnementaux ou encore de la réduction des inégalités. C'est tout l'enjeu d'un multilatéralisme repensé, plus inclusif et plus équilibré, où la voix des pays émergents et des acteurs de la société civile serait mieux prise en compte.
Dans ce contexte, l'Union européenne a un rôle crucial à jouer en tant que puissance d'équilibre et de médiation sur la scène mondiale. Forte de son attachement aux valeurs humanistes et aux principes de l'état de droit, elle doit œuvrer inlassablement au renforcement d'une gouvernance mondiale plus juste et plus efficace, seule à même de relever les immenses défis auxquels l'humanité est confrontée.
L'épisode des droits de douane imposés par Donald Trump est donc un nouveau signal d'alarme. Il est plus que temps de changer de logiciel et de réinventer un modèle de coopération internationale à la hauteur des enjeux du siècle. C'est le sens de l'Histoire. Et le prix de la paix et de la prospérité pour tous.