Les PDG face au défi de la gouvernance d’entreprise moderne
Le monde de l'entreprise est en pleine mutation. Parmi les évolutions marquantes, la remise en cause du modèle traditionnel de gouvernance centré autour de la figure du président-directeur général (PDG) concentrant tous les pouvoirs. Une tendance lourde se dessine en faveur d'une dissociation des fonctions de président du conseil d'administration et de directeur général. Mais quels sont les enjeux de ce bouleversement ? Décryptage.
L'émergence d'un nouveau paradigme de gouvernance
Longtemps érigé en modèle, le PDG « à la française » disposant des pleins pouvoirs opérationnels et stratégiques voit son règne contesté. Sous la pression des investisseurs et de la société civile, de plus en plus d'entreprises du CAC40 et du SBF120 franchissent le pas de la dissociation des fonctions de président et directeur général.
Cette évolution répond à une quête de meilleur équilibre des pouvoirs et de contrôle accru. L'objectif : éviter une concentration excessive des responsabilités dans les mains d'une seule personne et renforcer la supervision exercée par le conseil d'administration.
Le cas emblématique d'Alstom
Un exemple marquant de cette tendance est fourni par Alstom. En juin dernier, les actionnaires du géant ferroviaire ont voté la dissociation des fonctions de président et directeur général, mettant ainsi fin au règne d'Henri Poupart-Lafarge en tant que PDG.
Ce n'est pas un désaveu, mais une étape naturelle vers une gouvernance moderne et équilibrée.
– Un administrateur d'Alstom
Cet événement illustre la montée en puissance d'un activisme actionnarial en faveur de reformes de gouvernance. Les investisseurs institutionnels en particulier poussent pour davantage de contre-pouvoirs et de transparence.
Les défis du dialogue actionnarial
Cette aspiration à une gouvernance rénovée n'est cependant pas sans soulever des questions. Chez TotalEnergies par exemple, une résolution externe visant à séparer les rôles de président et directeur général a été rejetée, la direction arguant de la nécessité de conserver un pilotage unifié dans un contexte de transition énergétique.
Au-delà, c'est la capacité même du conseil d'administration et des actionnaires à peser réellement sur la stratégie et la gestion des risques extra-financiers des entreprises (notamment climatiques) qui est en jeu. Une interpellation croissante qui bouscule les habitudes.
Vers un rééquilibrage des pouvoirs
S'il ne constitue pas une panacée, le mouvement de dissociation des fonctions exécutives et de contrôle à la tête des grandes entreprises semble appelé à s'amplifier. Avec comme fil conducteur une recherche d'équilibre entre efficacité du management et redevabilité auprès des parties prenantes.
Cela passe par un renforcement du rôle du conseil d'administration, organe clé d'une gouvernance repensée. Au centre du jeu : sa capacité à incarner un contre-pouvoir crédible et à stimuler un dialogue exigeant avec la direction générale, au service d'un capitalisme plus responsable et durable.
Loin des postures, c'est donc un profond rééquilibrage des pouvoirs qui est à l'œuvre avec en ligne de mire une meilleure prise en compte des attentes de la société dans son ensemble. La gouvernance n'a pas fini de faire parler d'elle !