L’Europe au défi de relancer son industrie manufacturière
Sombre mois de novembre pour l'industrie manufacturière européenne. Selon l'indice PMI HCOB publié par S&P Global, l'activité a fortement chuté, atteignant son plus bas niveau depuis la crise du Covid-19. Un recul généralisé qui touche les principaux pays de la zone euro, Allemagne et France en tête. Dans ce contexte morose, quelles perspectives de reprise ? Tour d'horizon des défis et stratégies des industriels européens pour repartir de l'avant.
Une conjoncture dégradée sur tous les fronts
Avec un indice PMI tombé à 45,2 en novembre, contre 46,0 en octobre, le secteur manufacturier européen s'enfonce dans la récession. Un mauvais bulletin de santé partagé par les poids lourds industriels du Vieux continent :
- L'Allemagne, première économie européenne, est l'une des plus touchées avec un PMI au plus bas depuis 2020
- En France aussi, la contraction de l'activité manufacturière s'est accélérée
- Même constat de repli en Italie et en Espagne
Plusieurs indicateurs sont au rouge : chute des nouvelles commandes, recul marqué de la production, baisse des prix et des effectifs... Autant de signaux défavorables laissant présager un hiver difficile pour l'industrie européenne. D'autant que les tensions géopolitiques, de la guerre en Ukraine aux menaces de taxes douanières brandies par Donald Trump, assombrissent l'horizon du commerce international.
Défi n°1 : enrayer la chute des commandes
Premier enjeu crucial pour les industriels européens : stopper l'hémorragie des commandes, principale cause du ralentissement de la production. Un défi de taille dans un contexte de guerre en Ukraine, d'inflation galopante et de pouvoir d'achat en berne.
Il n'y a aucun signe d'une prochaine reprise des commandes au vu de la conjoncture actuelle.
- Cyrus de la Rubia, économiste en chef de la Hamburg Commercial Bank
Pour relancer la demande, certains misent sur des relocalisations de productions clés en Europe, tandis que d'autres parient sur l'export hors UE et une montée en gamme innovante pour séduire de nouveaux clients. Une équation complexe à résoudre pour enrayer la spirale baissière.
Défi n°2 : Investir malgré la crise
Autre impératif stratégique : maintenir les investissements malgré la dégradation des trésoreries. Une gageure alors que de nombreuses usines tournent au ralenti et que les coûts des matières premières et de l'énergie flambent. Pourtant, réduire les budgets d'innovations technologiques ou de transition écologique serait une erreur fatale pour la compétitivité future de l'industrie européenne. Nombreux sont les industriels qui refusent de sacrifier leurs projets de long terme sur l'autel des difficultés de court terme.
Il est vital de continuer à investir dans la modernisation de nos outils et le développement de solutions innovantes, même si le retour sur investissement est plus long. C'est le prix à payer pour rester dans la course mondiale.
- Un dirigeant d'ETI industrielle française
Robotisation, recyclage, efficacité énergétique, industrie 4.0... Les chantiers ne manquent pas pour renforcer l'outil industriel européen. Encore faut-il trouver les financements dans une période de vaches maigres. Un vrai casse-tête pour les trésoriers d'usine !
Défi n°3 : Attirer les talents malgré la crise
Dans ce climat anxiogène, les industriels doivent aussi relever le défi des ressources humaines. Comment attirer et fidéliser les compétences malgré les plans sociaux qui se profilent ? Un enjeu d'autant plus épineux que l'industrie peine déjà à recruter de jeunes diplômés, peu attirés par les métiers de production.
Pourtant, renoncer à embaucher les talents de demain serait hypothéquer la reprise future. D'où l'importance de soigner sa marque employeur, de miser sur la formation et de réenchanter les métiers industriels. Autant de clés pour préparer l'avenir malgré la tempête.
Coupes claires dans les effectifs ou préservation des compétences en attendant des jours meilleurs ? Chaque industriel doit trouver le bon équilibre pour passer le cap de la crise.
Cap sur la reprise malgré la crise
Malgré cet environnement pour le moins chahuté, les industriels européens n'ont pas dit leur dernier mot. Beaucoup sont déjà engagés dans des stratégies offensives pour traverser la tempête et préparer la reprise :
- Relocalisations et reshoring de productions stratégiques sur le sol européen
- Conquête de nouveaux marchés à l'export dans les zones en croissance
- Accélération des investissements de modernisation et d'innovation
- Montée en puissance du made in Europe et de la souveraineté industrielle
- Positionnement sur les marchés d'avenir : greentech, santé, mobilités...
Autant de paris stratégiques pour sortir par le haut de ce nouveau choc conjoncturel. Avec un mot d'ordre : continuer d'investir aujourd'hui dans l'industrie de demain, malgré les vents contraires. Un défi majeur pour la réindustrialisation du Vieux Continent, plus que jamais à la croisée des chemins. Les prochains mois seront décisifs !