L’évolution des chars de combat pour une nouvelle ère
Dans les plaines d'Ukraine, les carcasses carbonisées de chars témoignent de la vulnérabilité de ces mastodontes d'acier face aux missiles et drones ultramodernes. Pourtant, loin d'être condamnés, les chars de combat entrent dans une nouvelle ère, repensés et optimisés pour les conflits du futur. Une métamorphose technologique est en marche.
Les leçons de la guerre en Ukraine
Sur le front ukrainien, les chars se sont révélés vulnérables face à des adversaires inattendus. Conçus à l'origine pour des affrontements directs grâce à leur blindage frontal et leur puissance de feu, ils ont été pris au dépourvu par des drones suicides ciblant leurs points faibles et des missiles à très haute vélocité.
Face à un front figé, leur usage a dû être repensé. Plutôt qu'un fer de lance, ils sont devenus un soutien d'appui pour l'infanterie, cachés dans la végétation ou les bâtiments, effectuant des tirs indirects au-delà de leur ligne de vision. Un emploi sous-optimal pour ces engins coûteux, selon les experts.
Les utiliser ainsi est du gâchis, car l'artillerie est bien plus adaptée. L'amplitude de leur canon ne dépasse pas 17 à 18 degrés. Cette limitation de pointage les empêche d'atteindre des cibles situées à plus d'une dizaine de kilomètres.
– Marc Chassillan, consultant spécialiste des questions de défense
Protection active et mobilité accrue
Pour survivre, les chars misent désormais sur deux piliers : la mobilité et la protection active. Des plaques de blindage supplémentaires et des « cages » métalliques sont installées sur les points faibles comme le toit et le moteur pour faire détoner les charges à distance. Certains modèles comme le Merkava israélien intègrent des systèmes de contre-mesures automatiques pour intercepter les projectiles.
Les tactiques évoluent également, avec un retour du tir indirect et une doctrine basée sur la dispersion pour éviter d'offrir des cibles faciles, tout en permettant un recentrage rapide des forces pour un effort localisé. Les chars nouvelle génération devront être plus légers et agiles pour éviter les tirs plutôt que les encaisser.
Le char Leclerc se modernise
Conçu à la fin de la guerre froide, le char Leclerc français bénéficie d'une cure de jouvence avec le programme XLR. Au menu : nouveaux viseurs, mitrailleuse téléopérée, blindage renforcé sous le ventre et sur les flancs. Des améliorations jugées insuffisantes par certains face au retour des conflits de haute intensité.
Vers une nouvelle génération de blindés
Les leçons de l'Ukraine sont prises en compte pour les futures générations de chars. Les États-Unis planchent sur une version allégée de l'Abrams, le M1A3, avec un blindage repensé, une protection active et une motorisation plus discrète. La France et l'Allemagne avancent sur le MGCS, un char de rupture à l'horizon 2040, misant sur la furtivité, le combat collaboratif et des capacités de tir étendues.
L'idée, c'est de construire des véhicules beaucoup plus légers et manœuvrables pour éviter le feu plutôt que d'y survivre.
– Yohann Michel, Institut d'études de stratégie et de défense
L'avenir incertain des hélicoptères d'attaque
Comme les chars, les hélicoptères d'attaque ont montré leurs limites en Ukraine, vulnérables aux défenses sol-air et aux drones. Évoluant à basse altitude, ils restent indispensables pour des missions de reconnaissance et d'appui, mais leur avenir est en question. Les États-Unis ont abandonné leur programme de remplacement de l'Apache, jugeant le rapport coût/efficacité défavorable face aux drones armés. La France maintient sa flotte de Tigre, tablant sur une meilleure coordination avec les drones et des équipements adaptés.
Ainsi, loin d'être condamnés par les récents conflits, les chars de combat et les hélicoptères d'assaut entrent dans une nouvelle ère. Plus furtifs, plus mobiles, mieux protégés et interconnectés, ils devront s'adapter à un champ de bataille dominé par les menaces assymétriques et les systèmes robotisés. Une (r)évolution qui ne fait que commencer.