L’IA pour détecter les erreurs dans les qubits quantiques
Imaginez un instant que votre ordinateur se trompe une fois sur mille à chaque calcul… Pas très fiable, n'est-ce pas ? C'est pourtant le défi majeur auquel sont confrontés aujourd'hui les ordinateurs quantiques et leurs fameux qubits, bien plus sensibles aux erreurs que nos bits classiques. Mais que diriez-vous si l'intelligence artificielle venait à la rescousse pour détecter et corriger ces erreurs ? C'est le pari que vient de faire Google avec Alphaqubit, une IA dédiée à la traque des erreurs dans les qubits supraconducteurs.
Quand l'IA s'attaque aux erreurs quantiques
Fruit d'une collaboration entre les équipes de Google Deepmind, expertes en intelligence artificielle, et celles de Google Quantum AI, spécialistes de l'ordinateur quantique, Alphaqubit est un nouveau modèle d'IA destiné à repérer les erreurs qui perturbent les qubits supraconducteurs, sur lesquels mise Google pour développer ses ordinateurs quantiques.
L'objectif est clair : fiabiliser les calculs quantiques en identifiant précisément les moments où un qubit "déraille" et bascule dans un état non désiré, un phénomène malheureusement fréquent tant ces composants sont fragiles et sensibles à leur environnement. Une prouesse qu'Alphaqubit semble réaliser avec brio :
Alphaqubit serait 6% plus précis qu'un réseau de tenseurs, considéré jusqu'ici comme l'état de l'art en matière de détection d'erreurs quantiques.
Étude publiée dans Nature le 20 novembre
Décoder le code surface pour protéger l'information quantique
Pour détecter les erreurs, Alphaqubit s'est entraîné à décoder le code de surface, un code de correction d'erreurs quantiques très répandu. L'idée est d'utiliser une grille de qubits, certains stockant les données et d'autres, dits "auxiliaires", testant en permanence l'intégrité de leurs voisins. Si une erreur survient, un décodeur classique tente d'identifier le problème pour rétablir les qubits fautifs dans leur état initial.
L'enjeu est de taille, car seule une correction d'erreurs efficace permettra d'obtenir des qubits logiques stables et fiables, capables de mener à bien de longs calculs sans dérailler en chemin. Une étape cruciale vers des ordinateurs quantiques tolérants aux fautes.
Une IA entraînée aux rigueurs du monde quantique
Pour arriver à ce résultat, Alphaqubit a été soumis à un entraînement intensif, passant en revue des millions de scénarios d'erreurs générés par un émulateur quantique. Puis un ajustement de précision a été réalisé grâce à des données expérimentales issues du processeur quantique Sycamore de Google et ses 53 qubits.
Un apprentissage en deux temps qui a permis à Alphaqubit de cerner toutes les subtilités des erreurs quantiques, pour mieux les détecter ensuite. Une approche de plus en plus prisée, au point que les auteurs de l'étude évoquent une véritable "explosion" du machine learning appliqué au calcul quantique.
Vers des ordinateurs quantiques enfin fiables ?
Malgré ces progrès, du chemin reste à parcourir avant d'obtenir des ordinateurs quantiques réellement tolérants aux fautes. Les chercheurs estiment ainsi qu'il faudrait atteindre un taux d'erreur inférieur à 1 pour 1000 milliards (10-12) pour pouvoir factoriser un nombre de 2000 bits, là où les qubits actuels plafonnent péniblement à 1 erreur pour 1000 opérations (10-3).
Alphaqubit n'en reste pas moins une avancée prometteuse. En combinant la puissance de l'IA à la précision du quantique, Google ouvre peut-être la voie vers des qubits plus robustes et des calculs enfin fiables. De quoi rêver à terme à des avancées majeures en chimie, cryptographie ou encore en intelligence artificielle, autant de domaines où les ordinateurs quantiques sont très attendus.
Une chose est sûre : dans cette course effrénée vers l'ordinateur quantique du futur, tous les coups sont permis, y compris un mariage réussi entre intelligence artificielle et physique quantique. Après tout, qui a dit que l'union des contraires était forcément vouée à l'échec ?