L’impact économique de l’instabilité politique en France
La France traverse une nouvelle zone de turbulences politiques suite à la chute du gouvernement de Michel Barnier le 4 décembre dernier. Cet épisode inattendu plonge le pays dans une période d'incertitude majeure qui inquiète les entreprises et risque de peser sur l'activité économique dans les mois à venir.
Déjà avant cette crise politique, les perspectives économiques s'assombrissaient. L'OCDE venait de réduire à 0,9% ses prévisions de croissance pour la France en 2025, contre 1,3% auparavant. Le vote de la motion de censure à l'Assemblée nationale et l'absence de majorité claire pour gouverner pourraient détériorer encore davantage ce tableau.
Un coup de frein sur la consommation et l'investissement
Dans ce contexte politique troublé, les ménages comme les entreprises risquent de temporiser leurs décisions de dépenses et d'investissements. Même si le taux d'épargne des Français a atteint des records à 18,1% de leur revenu disponible, la consommation pourrait marquer le pas par manque de confiance.
Du côté des entreprises, l'attentisme s'installe aussi. Au troisième trimestre, leurs investissements ont déjà reculé de 3%. Et selon un baromètre de Bpifrance et Rexecode, la moitié des PME ont reporté certains projets. "On est dans un brouillard épais, les entreprises ne sont pas sûres qu'il y aura de la lumière au bout", résume l'économiste Anthony Morlet-Lavidalie.
Quel impact sur les finances publiques ?
L'absence probable de loi de finances pour 2025 fait aussi peser des incertitudes sur le plan budgétaire. Les économies devraient être moindres que prévu, avec une quinzaine de milliards d'euros en moins sur les dépenses de l'État. Mais les recettes aussi seront amputées.
Une hausse de 100 points des taux d'emprunt de la France représente 30 milliards d'euros de charge de la dette annuelle au bout de dix ans. C'est l'équivalent de ce que le pays doit investir chaque année pour sa transition énergétique.
– Mathieu Plane, économiste à l'OFCE
La hausse de la prime de risque sur la dette française, supérieure désormais à celle de la Grèce, pourrait aussi renchérir les conditions de financement des entreprises et des ménages. Même si l'impact sera surtout à long terme.
Les secteurs les plus exposés
Tous les secteurs ne seront pas logés à la même enseigne. L'agriculture et l'immobilier qui attendaient des mesures de soutien spécifiques seront pénalisés. Pour les autres, c'est surtout l'attentisme et le report des décisions qui risquent de prévaloir.
"L'activité au quotidien se poursuit, mais les décisions de moyen-long terme sont gelées", indique Frédéric Coirier, co-président du mouvement des entreprises de taille intermédiaire (METI). Selon l'OFCE, l'absence de perspectives politiques claires pourrait amputer la croissance de 0,2 point en 2025.
À cela s'ajoute un contexte international plus incertain avec l'arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche en janvier. De quoi assombrir encore un peu plus les perspectives, alors que le commerce extérieur restait le rare moteur de l'économie tricolore ces derniers mois.
Pour sortir de l'ornière, il faudra que les forces politiques trouvent rapidement un compromis et dégagent une majorité stable à même de redonner de la visibilité aux acteurs économiques. Sans quoi cette crise politique pourrait laisser des traces durables sur la santé des entreprises et le moral des ménages.