L’Industrie Cimentière en Quête de Solutions Bas Carbone
Depuis l'entrée en vigueur de la RE2020 il y a deux ans, un vent de changement souffle sur l'industrie cimentière française. Cette réglementation, qui vise à améliorer la performance énergétique des bâtiments neufs tout en prenant en compte l'empreinte environnementale des matériaux de construction, a en effet stimulé la demande pour les ciments dits "bas carbone" ou "à empreinte carbone réduite". Une tendance qui pousse les principaux acteurs du secteur à innover pour verdir leur production et répondre aux nouvelles attentes du marché.
Eqiom mise sur les ciments composés
Chez Eqiom, producteur de ciment et béton qui réalise 650 millions d'euros de chiffre d'affaires, la RE2020 a clairement boosté l'intérêt des clients pour les solutions bas carbone. "Nous ne communiquons réellement sur ces produits que depuis la RE2020, puisqu'il s'agit du seul moment où nos clients sont devenus réceptifs", explique Pierre-Yves Berthelemy, responsable marketing. L'entreprise mise notamment sur ses ciments composés intégrant jusqu'à 50% de laitier de hauts-fourneaux en substitution du clinker, permettant de réduire significativement les émissions de CO2.
Vicat enrichit son offre bas carbone
Même son de cloche du côté de Vicat, qui a vu ses ventes de ciments et bétons bas carbone plus que doubler entre 2022 et 2023 sous l'effet de la RE2020. Le cimentier enrichit son offre avec de nouveaux produits comme un ciment incorporant de la pouzzolane naturelle ou un autre réduisant de 10% le taux de clinker. Des solutions déjà mises en œuvre sur des chantiers phares comme le Village des athlètes pour les JO de Paris 2024.
Les prochains seuils de la RE2020 seront décisifs pour accroître la demande en produits bas carbone.
Pierre-Yves Berthelemy, Eqiom
Lafarge France plus mesuré
Si la direction de Lafarge France se montre plus mesurée quant à l'impact actuel de la RE2020, elle table sur une montée en puissance progressive, les seuils à venir en 2025 et 2028 devant être de vrais accélérateurs. Le cimentier vise 40% de ses ventes en ciments bas carbone et 25% en bétons bas carbone en 2024.
Ecocem parie sur un nouveau ciment
Ecocem mise quant à lui sur son nouveau ciment "Act", qui promet jusqu'à 70% de réduction d'empreinte carbone par rapport à un ciment standard. Un produit très attendu dont la commercialisation débutera par étapes en Europe dès 2024.
Un surcoût encore limitant
Au-delà du logement neuf, la demande en solutions bas carbone progresse aussi dans les travaux publics, même si la réglementation ne l'impose pas encore. Certains préfabricants béton comme Stradal proposent d'ores et déjà des gammes 100% sans ciment classique. Mais avec un surcoût d'environ 10%, le prix reste souvent un frein à une adoption plus large.
La RE2020 a indéniablement enclenché un cercle vertueux pour le développement et la diffusion de ciments plus respectueux du climat. Industriels comme utilisateurs semblent désormais regarder dans la même direction. De quoi espérer une décarbonation accélérée d'un secteur très émetteur, pour des bâtiments plus économes en énergie et en carbone, du début à la fin de leur cycle de vie.