L’Italie Ouvre une Enquête sur Shein pour Greenwashing
Le mastodonte chinois de la fast fashion Shein est dans le viseur du régulateur italien. L'autorité de la concurrence (AGCM) a annoncé le 25 septembre ouvrir une enquête pour pratiques commerciales déloyales à l'encontre de la société Infinite Style Services Co., qui gère le site web de Shein. En cause : des déclarations environnementales "génériques, vagues, déroutantes et/ou trompeuses" visant à verdir artificiellement l'image de la marque, malgré un modèle économique ultra polluant.
Shein accusé de maquiller son impact environnemental désastreux
L'AGCM pointe du doigt plusieurs éléments présents sur le site de Shein, notamment dans les rubriques "#SheinTheKnow", "evoluShein" et "Social Responsability". Le géant de l'e-commerce y met en avant une collection "durable", alors même que les vêtements ne sont pas recyclables et que le consommateur ne peut pas connaître la quantité réelle de fibres "vertes" utilisées.
Shein promeut aussi de forts engagements en faveur de la décarbonation, en contradiction flagrante avec l'augmentation de ses émissions de gaz à effet de serre mentionnée dans ses propres rapports de développement durable en 2022 et 2023. Une étude de l'association "Les amis de la Terre" l'an dernier révélait l'ampleur du désastre écologique :
Shein ajouterait quotidiennement sur son site entre 7 000 et 10 000 nouveaux modèles de vêtements, soit environ 1 million de produits. Cela reviendrait au total à 15 000 à 20 000 tonnes de CO2 émises par jour.
Les amis de la Terre
Un géant de la fast fashion pris la main dans le sac
Si l'autorité italienne confirme l'utilisation d'allégations environnementales mensongères, Shein encourt une amende de 5000 à 10 millions d'euros. Un montant dérisoire au regard de son chiffre d'affaires faramineux (32 milliards de dollars en 2023), mais qui pourrait fortement entacher sa réputation. La marque a réagi en assurant de son engagement à respecter les "lois et réglementations" et à "maintenir la transparence avec ses clients".
Cette mise en cause intervient alors que l'Union européenne a adopté de nouvelles règles contre le greenwashing, applicables dans tous les États membres d'ici 2026. Celles-ci interdiront les déclarations environnementales floues comme "écologique" ou "respectueux de l'environnement" sans preuves tangibles. Six pays, dont la France et l'Allemagne, ont aussi demandé plus de contrôles sur Shein et son concurrent Temu concernant la vente de produits potentiellement dangereux.
La fast fashion, une industrie à contre-courant des enjeux écologiques
Plus largement, c'est tout le modèle de la fast fashion, dont Shein est devenu le symbole, qui semble de plus en plus incompatible avec l'urgence climatique. Cette industrie, qui produit des vêtements peu chers et peu durables en très grandes quantités, est particulièrement énergivore et génère une quantité astronomique de déchets. Selon l'Agence européenne pour l'environnement :
- L'industrie textile mondiale émet 1,2 milliard de tonnes de CO2 par an, plus que les vols internationaux et le trafic maritime réunis.
- La fast fashion représente 20% de la pollution industrielle de l'eau dans le monde.
- Moins de 1% des vêtements sont recyclés pour produire de nouveaux vêtements.
Alors que la prise de conscience écologique grandit, la pression réglementaire et citoyenne devrait continuer de s'accroître sur des acteurs comme Shein. Le défi est immense pour ces géants basés sur une logique de surconsommation effrénée : il leur faudra se réinventer en profondeur pour espérer être compatibles avec un avenir soutenable.