L’UE veut renforcer la sécurité en ligne avant les élections allemandes
Alors que l'Allemagne s'apprête à voter lors d'élections fédérales anticipées le mois prochain, l'Union Européenne entend s'assurer que les géants du numérique mettent tout en œuvre pour endiguer la désinformation en ligne. Pour ce faire, la Commission Européenne a convié les mastodontes comme Meta, Google, TikTok ou encore Microsoft à un "test de résistance" le 31 janvier prochain.
L'objectif : vérifier si ces entreprises sont en conformité avec le Digital Services Act, le nouveau règlement européen contraignant les plateformes à avoir des garde-fous contre les fake news et contenus illégaux. Car l'enjeu est de taille : le scrutin allemand pourrait avoir de lourdes conséquences pour l'ensemble de l'UE, l'Allemagne étant le pays membre le plus peuplé et le moteur économique du bloc.
Apprendre des erreurs du passé
Cette initiative intervient alors que le spectre de l'ingérence électorale hante encore les esprits en Europe. L'an dernier, la Roumanie a dû annuler les résultats du premier tour de sa présidentielle suite à des preuves d'interférences russes, potentiellement amplifiées par l'algorithme de TikTok. Le pays a aussi subi pas moins de 85 000 cyberattaques visant les sites et infrastructures liées aux élections.
Pas question donc pour Bruxelles de revivre pareil scénario, surtout dans un pays aussi critique que l'Allemagne. D'autant que les réseaux sociaux sont déjà au cœur des débats outre-Rhin : Elon Musk a récemment interviewé sur X (ex-Twitter) Alice Weidel, la cheffe du parti d'extrême-droite AfD, donnant une exposition décuplée à ses idées controversées.
Les 7 géants de la tech dans le viseur
Concrètement, les responsables de la Commission vont soumettre sept géants du web américains à divers scénarios de crise le 31 janvier :
- Meta (Facebook, Instagram)
- X (ex-Twitter)
- TikTok
- Snapchat
- Microsoft
Campagnes de désinformation massives, deepfakes, cyberattaques... L'UE veut savoir comment ces entreprises réagiraient face à de telles menaces pouvant perturber le déroulement démocratique du vote. L'objectif est de tester leur degré de préparation et de conformité au Digital Services Act.
Ce règlement, entré en vigueur l'an dernier, impose de lourdes obligations aux grandes plateformes en ligne, notamment en matière de modération des contenus illégaux et préjudiciables. En cas de manquements, elles s'exposent à des amendes pouvant atteindre 6% de leur chiffre d'affaires mondial.
Une relation transatlantique sous tension
Cette annonce survient alors que les relations UE-USA sur le numérique sont quelque peu tendues. Donald Trump a fustigé hier à Davos la manière dont les régulateurs européens s'en prenaient aux géants de la tech américains comme Google ou Meta, y voyant "une forme de taxation".
Côté européen, on assume pleinement cette ligne dure, jugée nécessaire pour protéger les citoyens et la démocratie face à la toute-puissance des GAFAM. Ce "stress test" électoral sera donc scruté de près des deux côtés de l'Atlantique.
Une chose est sûre : alors que l'Europe a fait de la souveraineté numérique une priorité, elle entend plus que jamais affirmer son autorité régulatrice face aux mastodontes de la Silicon Valley. Et ce "crash test" grandeur nature en amont des élections allemandes en est la parfaite illustration.
Une bataille cruciale pour l'avenir de la démocratie
Au delà de la joute réglementaire, c'est bien la résilience de nos démocraties à l'ère numérique qui est en jeu. Fake news, bulles de filtre, manipulations en tous genres... Les réseaux sociaux ont démontré leur potentiel déstabilisateur ces dernières années, des élections américaines de 2016 au Brexit en passant par de nombreux scrutins.
Face à ce défi existentiel, l'Europe a décidé de contre-attaquer en responsabilisant davantage les plateformes. Ce "test de résistance" grandeur nature en est le parfait exemple. Reste à voir si les géants de la tech joueront le jeu et sauront se montrer à la hauteur de l'enjeu démocratique. Les élections allemandes, qui s'annoncent serrées et décisives, en seront un révélateur clé.
La désinformation en ligne est une menace existentielle pour nos démocraties. Nous devons tout faire pour garantir l'intégrité et l'équité de nos processus électoraux à l'ère du numérique.
Vera Jourova, Vice-Présidente de la Commission Européenne chargée des Valeurs et de la Transparence
Une chose est sûre : dans cette bataille cruciale, l'Europe a décidé de ne rien laisser au hasard. Vivement le 31 janvier pour voir si les GAFAM ont bien révisé leurs classiques en matière de lutte contre les fake news et autres ingérences. L'avenir de la démocratie en dépend.