Modifier un gène pour prolonger la durée de vie en bonne santé

Et si on pouvait vivre plus longtemps en bonne santé grâce à une simple modification génétique ? C'est le tour de force réalisé par des chercheurs de l'UCLA qui ont réussi à prolonger la durée de vie en bonne santé de mouches des fruits de 25 à 30% en modifiant les gènes produisant une protéine cellulaire courante : l'actine.

L'actine, une protéine clé du vieillissement

L'actine est une protéine essentielle qui joue un rôle central dans le cytosquelette en formant des réseaux de filaments fins et flexibles. Elle détermine la forme, la rigidité et les mouvements des cellules. Des études ont montré que le vieillissement altère l'expression de l'actine, perturbant les fonctions du cytosquelette, ce qui peut conduire à des maladies liées à l'âge comme le cancer ou les maladies neurodégénératives.

Les chercheurs de l'UCLA ont étudié le rôle de l'actine dans le vieillissement cérébral chez la drosophile. Ils ont observé que lorsque l'actine filamenteuse ou F-actine s'accumule dans le cerveau, elle entrave le nettoyage cellulaire et conduit à l'accumulation de déchets qui diminuent le fonctionnement neuronal et contribuent au déclin cognitif.

Modifier un gène pour empêcher l'accumulation d'actine

Mais surtout, ils ont découvert qu'en modifiant certains gènes chez la drosophile, ils pouvaient empêcher l'accumulation de F-actine et prolonger la durée de vie en bonne santé des mouches d'environ 30%. Pour cela, ils ont ciblé le gène Fhos connu pour jouer un rôle dans l'accumulation des filaments d'actine :

Lorsque nous avons réduit l'expression de Fhos dans les neurones vieillissants, cela a empêché l'accumulation de F-actine dans le cerveau.

– Edward Schmid, premier auteur de l'étude

Bien que la modification génétique ne cible que les neurones, les chercheurs ont constaté qu'elle améliorait la santé globale des mouches. Non seulement elles vivaient 25 à 30% plus longtemps, mais elles présentaient aussi des signes d'amélioration des fonctions cérébrales et d'autres marqueurs de meilleure santé dans d'autres organes.

L'actine perturbe le système de recyclage cellulaire

En examinant de plus près, les chercheurs ont découvert que l'accumulation de F-actine perturbait le système de recyclage cellulaire appelé autophagie. Ce processus vital décompose et nettoie les protéines et autres substances cellulaires anciennes, endommagées ou anormales. De plus en plus de preuves montrent que l'activité autophagique diminue avec l'âge, y compris dans le cerveau.

En empêchant l'accumulation de F-actine, ils ont observé une augmentation de l'autophagie dans le cerveau des drosophiles âgées. Et lorsqu'ils ont supprimé la F-actine mais désactivé l'autophagie, le vieillissement n'était plus ralenti. Il semblerait donc que le principal mécanisme par lequel la F-actine accélère le vieillissement cérébral soit en altérant l'autophagie.

Des pistes pour ralentir le vieillissement chez l'homme

Avant de pouvoir appliquer ces résultats à l'homme, des recherches supplémentaires seront nécessaires. Mais cette étude offre un espoir de ce qu'il pourrait être possible d'accomplir :

Nous voulons aider les gens à profiter d'une bonne santé et d'une qualité de vie élevée tout en prolongeant leur durée de vie. Notre étude a amélioré les fonctions cognitives et intestinales, le niveau d'activité et la santé globale des mouches des fruits - et offre de l'espoir sur ce que nous pourrions réussir chez l'homme.

– David Walker, auteur principal de l'étude

D'autres stratégies testées par les chercheurs se sont aussi montrées efficaces pour réduire l'accumulation de F-actine et promouvoir la longévité chez la drosophile :

• La restriction calorique : les mouches nourries avec un régime pauvre en protéines vivaient significativement plus longtemps que celles ayant un régime riche.
• La rapamycine : cet immunosuppresseur connu pour prolonger la durée de vie a réduit la F-actine dans le cerveau des mouches âgées par rapport aux témoins du même âge.

Ces approches pourraient donc aussi avoir un potentiel intéressant chez l'homme pour promouvoir un vieillissement en meilleure santé. Les futures recherches devront maintenant confirmer si ces résultats se traduisent à l'homme. Mais cette étude offre des pistes prometteuses pour mieux comprendre et potentiellement ralentir le vieillissement cérébral.