Morphocell lève 50 M$ pour régénérer le foie
Imaginez un monde où l’on ne meurt plus en attendant une greffe de foie. Un monde où, au lieu de remplacer l’organe, on le régénère de l’intérieur, comme une plante qui repousse après l’hiver. Ce n’est plus de la science-fiction : une startup montréalaise vient de franchir une étape décisive vers cette réalité.
Morphocell boucle sa Série A à 50 millions de dollars
Ce lundi 2 décembre 2025, Morphocell Technologies a annoncé avoir complété son tour de table Série A à 50 millions de dollars américains (environ 70 millions CAD). Un montant impressionnant pour une biotech encore jeune, mais qui reflète l’immense espoir placé dans sa technologie.
Dix millions supplémentaires viennent s’ajouter aux 40 millions levés en avril 2024. Cette extension a été co-dirigée par Investissement Québec et le fonds italien CDP Venture Capital, signe que la technologie attire désormais au-delà des frontières canadiennes.
ReLiver : quand les cellules souches réparent le foie
Au cœur du projet se trouve ReLiver, une thérapie cellulaire basée sur des cellules souches pluripotentes. L’idée est simple sur le papier, révolutionnaire dans les faits : injecter des cellules capables de se transformer en hépatocytes fonctionnels directement dans le foie du patient.
Contrairement à une greffe, il n’y a ni donneur à trouver, ni compatibilité à vérifier, ni traitement antirejet à vie. Le corps du patient devient son propre atelier de réparation.
« Nous ne remplaçons pas le foie, nous le faisons renaître. »
– Dr Massimiliano Paganelli, PDG et cofondateur de Morphocell
Un marché énorme et une urgence vitale
Chaque année, des centaines de milliers de personnes meurent d’insuffisance hépatique dans le monde. Au Canada seul, plus de 500 patients sont en liste d’attente pour une greffe… et un quart n’y survivront pas.
Les causes se multiplient : hépatites, stéatose hépatique liée à l’obésité, alcool, médicaments. Le foie est un organe résilient, mais il a ses limites. Quand il lâche, les options actuelles sont dramatiquement restreintes.
- Greffe : rare, coûteuse, risquée
- Foie artificiel : palliatif temporaire
- Attente… souvent fatale
ReLiver veut devenir la quatrième option : une injection, une régénération, une vie sauvée.
Des racines italiennes et un rayonnement international
Le PDG Massimiliano Paganelli et la directrice scientifique Claudia Raggi sont tous deux italiens. Leur histoire personnelle transparaît dans la stratégie : l’investissement de CDP Venture Capital n’est pas anodin.
Morphocell ouvrira bientôt son premier bureau européen en Italie. Un pont transatlantique qui permettra d’accéder à des talents, des infrastructures de recherche et, à terme, au marché européen.
Entre Montréal (siège), Toronto, Cambridge (Massachusetts) et bientôt l’Italie, la startup tisse un réseau scientifique de premier plan.
À quoi vont servir ces 50 millions ?
L’argent ne va pas dormir sur un compte. Le plan est clair et ambitieux :
- Atteindre la preuve de concept clinique pour ReLiver
- Multiplier par dix la capacité de production cellulaire
- Recruter massivement (l’équipe est déjà passée à 44 personnes)
- Préparer la Série B… qui s’annonce colossale
- Ouvrir le bureau italien et poser les bases européennes
En clair : transformer une promesse scientifique en produit médical réel.
Le Québec, terre de biotech d’excellence
Ce n’est pas un hasard si Morphocell est née à Montréal. Le Québec investit massivement dans les sciences de la vie depuis des années.
« L’industrie des sciences de la vie offre une vitrine mondiale au talent et à l’expertise québécois. »
– Bicha Ngo, présidente-directrice générale d’Investissement Québec
Avec des institutions comme l’IRCM, McGill, l’Université de Montréal et un écosystème de fonds spécialisés (Genson Capital, Amplitude Ventures, Lumira…), le Québec est devenu une plaque tournante nord-américaine de la biotech.
Morphocell n’est pas un cas isolé : Feldan Therapeutics, Repare Therapeutics ou encore Specific Biologics portent aussi les couleurs québécoises sur la scène mondiale.
Et après ? Vers les premiers essais cliniques
Les prochaines étapes sont cruciales. La FDA et Santé Canada vont scruter chaque donnée préclinique. Les premiers patients pourraient recevoir ReLiver dès 2027-2028 si tout se passe bien.
Entre-temps, la concurrence s’organise : LyGenesis (États-Unis), Ambys Medicines ou encore des équipes académiques japonaises et chinoises travaillent sur des approches similaires. La course est lancée.
Mais Morphocell a plusieurs atouts : une technologie propriétaire d’encapsulation des cellules, une équipe scientifique d’exception et maintenant les moyens financiers de ses ambitions.
Pourquoi ça nous concerne tous
Derrière les millions et les communiqués de presse, il y a des vies humaines. Des pères de famille, des mères, des jeunes qui n’auront peut-être plus à choisir entre mourir ou vivre avec l’épée de Damoclès d’une greffe.
Si ReLiver fonctionne, il ne sauvera pas seulement des milliers de vies chaque année. Il ouvrira la voie à la régénération d’autres organes : reins, pancréas, cœur… Un nouveau chapitre de la médecine.
Et tout ça part d’un petit labo à Montréal, porté par deux chercheurs italiens et soutenu par des investisseurs qui croient que, oui, on peut réparer un corps comme on répare une maison.
La régénération n’est plus une utopie. Elle a un nom : Morphocell. Et elle vient de passer à la vitesse supérieure.