Ne pas suivre la charge de travail en forfait-jours, un risque pour l’employeur
Le forfait-jours, un mode d'organisation du temps de travail séduisant mais non dénué de risques pour l'employeur. En effet, ne pas assurer un suivi rigoureux de la charge de travail des salariés concernés expose l'entreprise à de lourdes sanctions financières. Retour sur les obligations et les bonnes pratiques en la matière.
Le forfait-jours, un régime dérogatoire strictement encadré
Permettant de décompter le temps de travail en jours et non en heures, le forfait-jours offre une grande souplesse mais n'est accepté par le juge qu'à plusieurs conditions :
- Existence d'un accord collectif le mettant en place
- Suivi régulier de la charge de travail via un document dédié et un entretien annuel
- Respect des temps de repos obligatoires (11h/jour, 35h/semaine)
Des managers peu sensibilisés aux risques
En pratique, de nombreux managers ferment les yeux sur les dérives, faisant primer les impératifs business. Une "hypocrisie" qui peut coûter cher, alerte Me Emilie Meridjen, avocate en droit social.
Les managers de proximité doivent être formés aux risques qu'ils font courir à leur employeur en n'assurant pas le suivi de la charge de travail, obligatoire.
Me Emilie Meridjen, avocate associée Sekri Valentin Zerrouk
Obligation de moyens renforcée pour l'employeur
Outre la mise à disposition d'un document de suivi (idéalement informatisé), l'employeur doit pouvoir justifier de sa prise en compte effective, insiste Me Meridjen :
- Traitement des alertes remontées par le salarié
- Formalisation des conclusions des entretiens annuels
- Actions concrètes en cas de surcharge avérée (réduction de la charge, embauche, etc.)
Sanction du non-respect : retour aux 35h et lourds rappels
À défaut de suivi, la convention de forfait-jours devient inopposable. Le salarié est alors considéré comme soumis aux 35h et peut réclamer :
- Le paiement d'heures supplémentaires sur plusieurs années
- Des dommages et intérêts pour non-prise de repos et RTT
Des sommes pouvant dépasser 150 000 € par salarié, d'où l'importance d'une vigilance de tous les instants. Pour Me Meridjen, mieux vaut parfois embaucher que s'exposer à de tels risques !
En résumé : les 5 commandements du forfait-jours
- Mettre en place un accord collectif conforme
- Fournir un document de suivi et veiller à sa tenue régulière
- Réaliser des entretiens annuels dédiés, formalisés par écrit
- Former les managers aux risques liés au non-respect du suivi
- Prendre des mesures concrètes en cas de surcharge constatée
Loin d'être une formalité, le suivi rigoureux de la charge de travail des salariés en forfait-jours est essentiel pour sécuriser ce dispositif et prévenir des sanctions financières désastreuses. Une vigilance accrue s'impose à tous les niveaux de l'entreprise.