Nexus Venture Partners Lance un Fonds de 700M$

Imaginez un fonds de capital-risque de 700 millions de dollars qui refuse de suivre la foule. Alors que la plupart des investisseurs se précipitent vers l’intelligence artificielle sans regarder ailleurs, une firme emblématique du venture capital choisit une voie différente. Nexus Venture Partners vient d’annoncer son nouveau fonds, et il réserve exactement la moitié de ses capitaux aux startups indiennes. Une décision audacieuse dans un monde où l’IA semble tout absorber.

Un équilibre rare dans le paysage du venture capital

Depuis plusieurs années, l’intelligence artificielle capte l’essentiel des investissements mondiaux. Les fonds se concentrent sur les modèles de langage, les agents autonomes et les infrastructures cloud. Pourtant, Nexus Venture Partners, fondée en 2006, refuse de mettre tous ses œufs dans le même panier. Avec ce huitième fonds de 700 millions de dollars, la société maintient une stratégie qui lui est chère depuis ses débuts : combiner les opportunités américaines en technologie profonde avec le dynamisme du marché indien.

Ce choix n’est pas anodin. Il reflète une vision à long terme et une conviction profonde que la diversification reste la meilleure protection contre les bulles sectorielles. En réservant 350 millions de dollars aux startups indiennes, Nexus mise sur un écosystème qui continue de croître à un rythme impressionnant, malgré les défis macroéconomiques.

Une histoire de cross-border depuis 2006

Nexus Venture Partners est née avec une ambition unique : créer un pont entre la Silicon Valley et l’Inde. Avec des bureaux à Menlo Park, Mumbai et Bengaluru, l’équipe opère comme une seule entité, sans cloisonnement géographique. Cette approche intégrée permet d’investir dans des sociétés américaines très techniques tout en soutenant des acteurs majeurs du marché indien.

Parmi ses succès les plus connus, on retrouve des noms comme Postman (plateforme de collaboration pour développeurs), Apollo (outil de prospection commerciale), ou encore MinIO (stockage objet open-source). Côté Inde, le portefeuille inclut des licornes telles que Zepto, Delhivery, Rapido ou Infra.Market. Cette double casquette explique pourquoi la firme peut se permettre de ne pas tout miser sur l’IA.

« L’IA représente un tournant majeur, et nous y ancrons une grande partie de notre stratégie. Mais nous voyons aussi que beaucoup de ces innovations servent à mieux répondre aux besoins des masses. »

– Jishnu Bhattacharjee, managing partner chez Nexus Venture Partners

Cette citation illustre parfaitement la philosophie de Nexus : l’IA n’est pas un objectif en soi, mais un levier pour résoudre des problèmes concrets, notamment dans les marchés émergents.

Pourquoi l’Inde reste un marché incontournable

Malgré un écosystème IA encore moins mature qu’aux États-Unis, l’Inde possède des atouts uniques. Le pays compte l’un des plus grands viviers de talents en ingénierie au monde, une infrastructure numérique qui se développe à grande vitesse et une demande croissante pour des solutions localisées.

Les startups indiennes construisent aujourd’hui des modèles d’IA adaptés aux multiples langues du pays, aux spécificités culturelles et aux contraintes locales. Elles s’appuient souvent sur des outils open-source et sur des infrastructures domestiques en pleine émergence.

• Une population jeune et ultra-connectée
• Des besoins massifs en fintech, e-commerce rapide et logistique
• Une adoption accélérée de l’IA dans les services quotidiens
• Des acteurs locaux qui développent des solutions souveraines

Le cas de Zepto, la plateforme de quick-commerce, est emblématique. L’entreprise utilise l’intelligence artificielle pour optimiser la gestion des stocks, le routage des livreurs et même le support client. Ce qui était autrefois un commerce traditionnel devient une machine hyper-optimisée grâce à l’IA.

L’IA au service des besoins indiens

Nexus observe que l’IA ne se limite plus aux grands laboratoires américains. En Inde, elle devient un outil d’inclusion et d’efficacité. Les startups locales développent des agents conversationnels multilingues, des solutions de vision par ordinateur pour la logistique ou encore des modèles d’IA embarqués dans des applications grand public.

Autre exemple marquant : Neysa, une société d’infrastructure IA qui répond aux exigences spécifiques de l’Inde, comme le traitement souverain des données et le support des langues régionales. Ces initiatives montrent que le pays peut non seulement adopter l’IA, mais aussi la façonner à son image.

« L’Inde a le potentiel de sauter plusieurs étapes dans l’écosystème IA grâce à son talent, son infrastructure numérique et sa demande pour des solutions localisées. »

– Jishnu Bhattacharjee

Cette capacité à « leapfrog » (sauter des étapes) est précisément ce qui attire les investisseurs comme Nexus. Plutôt que de copier les modèles américains, les entrepreneurs indiens créent des solutions adaptées à leurs réalités.

Une stratégie early-stage qui ne change pas

Malgré la taille du fonds (700 millions de dollars, comme les précédents), Nexus reste fidèle à son ADN : investir très tôt, souvent dès le stade de pré-seed ou seed, avec des tickets allant de quelques centaines de milliers à un million de dollars.

L’équipe, composée de seulement huit partenaires, préfère rester agile plutôt que de grossir démesurément. « Nous ne levons pas d’argent pour le plaisir de lever », explique Jishnu Bhattacharjee. Cette discipline a permis à Nexus de réaliser plus de 30 exits, dont plusieurs IPO, tout en maintenant un taux de retour élevé pour ses investisseurs.

Le fonds est largement souscrit par des LPs historiques (États-Unis, Europe, Moyen-Orient, Asie du Sud-Est et Japon), preuve que la stratégie paye depuis deux décennies.

Un message pour les entrepreneurs

Pour les fondateurs, le message de Nexus est clair : l’IA est importante, mais pas exclusive. Les startups qui combinent technologie de pointe et impact marché massif, surtout en Inde, ont toutes leurs chances.

Que vous développiez un agent IA pour le commerce électronique, une solution fintech multilingue ou une plateforme logistique intelligente, Nexus reste à l’écoute. Son approche équilibrée montre qu’il est encore possible de construire un portefeuille diversifié sans sacrifier le potentiel de rendement.

Dans un écosystème où la peur de rater le train de l’IA pousse beaucoup à l’uniformité, Nexus Venture Partners rappelle qu’une vision à long terme et une vraie diversification restent les meilleurs alliés de la performance.

Le nouveau fonds de 700 millions de dollars n’est donc pas seulement une levée de fonds supplémentaire : c’est une déclaration d’intention. Celle d’un acteur qui croit encore que l’innovation la plus puissante naît souvent à la croisée des chemins, entre la Silicon Valley et les rues animées de Mumbai ou Bengaluru.

Et vous, pensez-vous que cette stratégie d’équilibre entre IA et marchés émergents est la bonne ? L’avenir nous le dira, mais Nexus semble déjà avoir un temps d’avance.