Nokia à Ottawa : Souveraineté AI ou Subvention Toxique ?

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novembre 26, 2025

Nokia à Ottawa : Souveraineté AI ou Subvention Toxique ?

Imaginez la scène : un terrain enneigé d’Ottawa, des pelleteuses dorées, des politiciens en veston-cravate qui piochent dans la terre avec des pelles neuves. Au centre, le ministre de l’IA brandit le drapeau de la « souveraineté numérique »… devant le logo géant de Nokia, entreprise finlandaise. Bienvenue dans le paradoxe canadien version 2025.

Quand la souveraineté AI s’invite chez un géant étranger

Le 26 novembre 2025, le gouvernement Trudeau a annoncé 72 millions de dollars d’argent public pour aider Nokia à transformer son campus de Kanata North en un centre R&D de 750 000 pieds carrés. Objectif affiché : créer 340 emplois hautement qualifiés et renforcer la « souveraineté artificielle intelligence » du Canada.

Le ministre Evan Solomon n’a pas hésité : « Voilà à quoi ressemble la souveraineté AI dans la vraie vie. » Il a même répété deux fois la formule « sovereignty is not solitude » comme un mantra. Pour lui, employer des Canadiens, développer des technologies critiques (fibre optique, réseaux quantiques sécurisés, IA) sur le sol canadien suffit à cocher toutes les cases.

« C’est exactement ce que signifie être une nation forte et souveraine : avoir des partenaires de longue date qui grandissent ici et qui resteront ici. »

– Evan Solomon, ministre de l’Intelligence artificielle du Canada

Le cri d’alarme de Tobi Lütke

Quelques heures plus tard, le PDG de Shopify a dégainé sur X. Et le moins qu’on puisse dire, c’est qu’il n’a pas mâché ses mots.

« C’est toxique. Ça rend la main-d’œuvre deux fois moins chère pour les succursales étrangères que pour les entreprises canadiennes qui se battent autour. »

– Tobi Lütke

Pour le fondateur de la plus grande réussite tech canadienne, subventionner des géants étrangers pour des emplois de connaissance est tout simplement « une idée totalement stupide ». Il accepte ce modèle pour les usines ou les centres de données, mais pas quand il s’agit de cerveaux.

Le syndrome du « branch plant » 3.0

Le Council of Canadian Innovators (CCI) tape exactement sur le même clou depuis des années. Pour son président Ben Bergen, tout entreprise incorporée au Canada est considérée « canadienne » par Ottawa, même si le siège social est à Helsinki, Redmond ou Mountain View.

Résultat ? Les milliards du budget innovation coulent en partie vers des filiales qui rapatrient ensuite les profits et la propriété intellectuelle à l’étranger. Le CCI parle d’un « chèque à un multinational étranger » qui ne construit en rien la souveraineté.

Le campus Nokia d’Ottawa n’est d’ailleurs pas né de la cuisse de Jupiter : c’est l’ancien siège de Newbridge Networks, fleuron canadien racheté, découpé, puis intégré au géant finlandais. Une histoire que beaucoup de vétérans de Kanata racontent avec une pointe d’amertume.

340 emplois… mais à quel prix ?

Officiellement, l’opération va créer 340 postes et moderniser un campus qui emploiera plus de 1 900 personnes d’ici 2029. Nokia met en avant ses travaux sur les réseaux 5G/6G, la cybersécurité quantique et l’intelligence artificielle appliquée aux télécoms.

Des technologies jugées « absolument critiques » par le ministre Solomon. Et effectivement, personne ne conteste l’excellence technique des équipes d’Ottawa. Mais la question reste entière : pourquoi faut-il 72 millions de dollars publics pour qu’un groupe qui pèse 22 milliards d’euros décide d’investir… au Canada ?

Jeffrey Maddox, président de Nokia Canada, a pourtant été clair : « Le gouvernement a été un partenaire fantastique. Le Canada bouge plus vite qu’aucun autre pays sur ces sujets. » Traduction : les subventions ont joué un rôle décisif.

Souveraineté ou solitude : le grand écart canadien

Le même Evan Solomon qui célèbre Nokia déclarait il y a quelques mois à Montréal : « Nous ne pouvons pas être une nation de succursales, nous devons être une nation de quartiers généraux IA. » Difficile de ne pas voir la contradiction.

Le gouvernement marche sur une corde raide : d’un côté, il faut attirer les investissements étrangers pour rester dans la course mondiale ; de l’autre, il faut éviter que le Canada ne devienne un simple terrain de jeu pour les géants.

Le projet de « cloud souverain » illustre parfaitement cette tension. Solomon refuse d’exclure les partenaires américains, alors même que la souveraineté est censée protéger les données canadiennes de toute coercition étrangère.

Les maires et députés applaudissent, les entrepreneurs grincent des dents

Sur le terrain, les élus locaux se réjouissent. La députée de Kanata North parle d’un « vote de confiance », le maire d’Ottawa affirme que « nous considérons Nokia comme une entreprise locale ». Difficile de leur en vouloir : 340 emplois qualifiés dans une région qui a vu partir bien des fleurons, c’est pain béni.

Mais à quelques kilomètres de là, les fondateurs de startups qui se battent pour recruter des ingénieurs à 180 000 $ par an regardent le même spectacle avec une toute autre émotion. Quand une succursale étrangère peut offrir le même salaire avec 20-30 % de subventions indirectes, la concurrence devient déloyale.

Et si la vraie question était ailleurs ?

Au-delà du cas Nokia, c’est toute la stratégie canadienne en matière d’innovation qui est mise sur la table.

  • Faut-il continuer à payer cher pour attirer des centres de R&D étrangers ?
  • Ou concentrer les milliards sur les entreprises nées ici, même si elles sont plus petites et plus risquées ?
  • Peut-on être souverain en IA tout en dépendant de géants étrangers pour les infrastructures critiques ?
  • Et finalement : la souveraineté, est-ce contrôler ses données… ou contrôler ses entreprises ?

Le débat est loin d’être tranché. Mais une chose est sûre : l’épisode Nokia vient de le propulser au cœur de la campagne électorale qui s’annonce.

Entre les photos officielles de pelleteuses dorées et les tweets rageurs des entrepreneurs, le Canada cherche encore la recette qui lui permettra de passer du statut de terrain de jeu des géants à celui de joueur majeur. Et pour l’instant, personne n’a trouvé la bonne formule.

À suivre. Très attentivement.

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