Nouveau Lien Irréfutable Entre Viande Rouge et Cancer Identifié
Le cancer colorectal est le 3e cancer le plus fréquent dans le monde. Si des facteurs génétiques entrent en jeu, l'alimentation joue aussi un rôle clé, notamment la consommation excessive de viande rouge. Des chercheurs du National Cancer Center Singapore viennent de découvrir le mécanisme précis expliquant ce lien, ouvrant la voie à de nouveaux traitements ciblés prometteurs.
La viande rouge, un facteur de risque établi
De nombreuses études épidémiologiques ont déjà montré une association entre forte consommation de viande rouge (bœuf, porc, agneau) et risque accru de développer un cancer colorectal. Cependant, le mécanisme biologique sous-jacent restait mal compris.
L'équipe du Dr Leow Voon Yee a entrepris de creuser cette question. Leurs travaux, publiés dans Nature Communications, apportent un nouvel éclairage sur les mécanismes moléculaires en jeu et ouvrent des perspectives thérapeutiques innovantes.
Le rôle clé d'un sucre peu commun
Les chercheurs se sont intéressés à un sucre spécifique présent dans la viande rouge : le Neu5Gc. Contrairement à la plupart des mammifères, l'Homme est incapable de synthétiser ce sucre. Lorsqu'il est absorbé via l'alimentation, le système immunitaire le reconnaît comme un corps étranger et fabrique des anticorps dirigés contre lui.
L'équipe a découvert que ces anticorps anti-Neu5Gc interagissent avec un récepteur présent à la surface des cellules intestinales, le TLR4. Cette interaction déclenche une cascade de réactions conduisant à une inflammation chronique de la muqueuse intestinale. Or, on sait que l'inflammation joue un rôle majeur dans l'apparition et la progression des tumeurs.
Nos résultats établissent un lien direct entre consommation de viande rouge, réponse immunitaire anti-Neu5Gc et cancer colorectal via l'activation du récepteur TLR4 et l'inflammation chronique qui en résulte.
– Dr Leow Voon Yee, chercheur principal de l'étude
Vers de nouveaux traitements ciblés
Au-delà de l'identification de ce mécanisme, les chercheurs sont allés plus loin en testant une approche pour le contrecarrer. Ils ont développé un anticorps monoclonal capable de bloquer spécifiquement l'interaction entre les anti-Neu5Gc et le récepteur TLR4.
Testé sur des souris genetiquement modifiées pour exprimer le Neu5Gc humain et nourries avec un régime riche en viande rouge, cet anticorps a permis de prévenir le développement de lésions précancéreuses et de tumeurs du côlon. Cette "preuve de concept" ouvre des perspectives excitantes :
- Développement de nouveaux médicaments anti-cancéreux ciblant l'axe Neu5Gc/TLR4
- Tests de dépistage basés sur le dosage des taux d'anti-Neu5Gc pour identifier les personnes à risque
- Confirmation du rôle délétère des excès de viande rouge, argument supplémentaire pour une alimentation équilibrée limitant ce type d'aliments
Un espoir pour les patients
Cette découverte représente une avancée majeure dans la compréhension des facteurs de risque alimentaires du cancer colorectal. Elle pourrait déboucher sur de nouvelles stratégies de prévention, de dépistage et de traitement de ce cancer qui touche plus de 1,9 million de personnes chaque année dans le monde.
Des essais cliniques seront nécessaires pour confirmer si cette approche est sûre et efficace chez l'Homme. Mais ces résultats ouvrent d'ores et déjà de nouveaux horizons prometteurs dans la lutte contre le cancer colorectal, avec l'espoir de réduire le fardeau de cette maladie et d'améliorer la survie et la qualité de vie des patients.