Perplexity : Le grand gagnant de la soirée électorale
Mardi dernier, alors que tous les regards étaient braqués sur les résultats des élections présidentielles américaines, une startup d'intelligence artificielle faisait une entrée remarquée sur le devant de la scène médiatique. Son nom ? Perplexity. Sa mission ? Proposer une source d'information fiable et en temps réel via son chatbot électoral, une grande première.
Perplexity mise gros et réussit son pari
La semaine précédant le scrutin, Perplexity a surpris tout le monde en annonçant le lancement de son hub d'informations électorales. Une plateforme alimentée en direct par les données de comptage des votes fournies par Democracy Works et Associated Press, les mêmes sources utilisées par Google pour sa carte électorale. Un choix audacieux quand on sait que la plupart des autres chatbots d'IA comme ChatGPT ou Google Gemini ont préféré s'abstenir de répondre aux questions liées à l'élection.
On comprend leur prudence. Au cours des derniers mois, nombre de ces IA ont été prises en flagrant délit d'hallucination, générant des réponses erronées voire complètement farfelues. Même ChatGPT Search, le concurrent de Google récemment lancé par OpenAI, ne s'est pas senti suffisamment armé pour affronter cette échéance électorale. Son patron Sam Altman reconnaissant que le produit était encore trop peu fiable pour un usage grand public.
C'était sans compter sur l'audace de Perplexity. Lancé dès décembre 2022, son chatbot n'a cessé d'être testé et affiné au contact des utilisateurs. La startup était donc confiante dans la capacité de son IA à relever le défi d'une soirée électorale.
Trafic record et défi lancé aux médias
Le hub électoral de Perplexity a semble-t-il été largement plébiscité par les internautes en quête d'une information claire et rapide. Son PDG Aravind Srinivas revendiquant un "trafic record" dans les jours qui ont précédé et suivi l'élection.
Un succès qui pourrait toutefois se retourner contre la startup. Le groupe de presse Dow Jones vient en effet de lancer une action en justice, accusant Perplexity de concurrencer déloyalement les médias traditionnels en utilisant leurs contenus sans contrepartie financière. Car si le chatbot prend soin de citer ses sources et d'inclure des liens sortants, rien n'obligeait les utilisateurs à quitter l'application pour obtenir une vue complète et en direct de la situation.
La réussite en demi-teinte de l'IA électorale
Malgré les polémiques, force est de constater que le pari de Perplexity est en grande partie réussi. Son interface incluait :
- Une carte électorale interactive mise à jour en quasi temps réel, distinguant en rouge et bleu les états remportés par chaque candidat.
- Un suivi détaillé du décompte des votes dans les swing states clés.
- Des réponses plutôt pertinentes aux questions des utilisateurs sur l'état de la course, avec des informations sourcées et recontextualisées.
Bien sûr, tout n'était pas parfait. Des bugs ont été signalés sur la carte et le chatbot s'est parfois laissé aller à quelques hallucinations mineures. On était également loin de la richesse d'analyse d'un commentateur chevronné de CNN. Mais dans l'ensemble, Perplexity a fait la preuve qu'une IA bien entraînée pouvait se muer en une source d'information électorale fiable, en complément du travail des médias.
Avec son hub électoral, Perplexity ne prétend pas remplacer les journalistes ou les experts politiques. Nous voulons proposer un nouveau canal d'information complémentaire, en phase avec les usages numériques actuels.
Aravind Srinivas, CEO de Perplexity
Vers une démocratisation de l'IA électorale ?
Au-delà du cas Perplexity, cette élection marque un tournant. Pour la première fois, des agents conversationnels se sont invités dans le processus démocratique à grande échelle. Certes, la plupart ont préféré rester sur la touche. Mais le succès de Perplexity ouvre la voie à une utilisation accrue de l'IA lors des prochains scrutins.
A mesure que la technologie progressera, on peut imaginer que les chatbots électoraux gagneront en fiabilité et en pertinence. Ils pourraient devenir de précieux assistants pour les citoyens, en leur permettant d'accéder facilement à une information factuelle et pédagogique sur les enjeux et le déroulement des élections.
Les médias traditionnels ont du souci à se faire. S'ils veulent rester au cœur du jeu démocratique, ils vont devoir redoubler d'efforts pour proposer une couverture électorale innovante et de haute qualité. Car les électeurs, eux, ont pris goût à ces nouvelles interfaces d'information.
L'avenir des élections passera-t-il par l'IA ? Une chose est sûre : après son coup d'éclat, Perplexity compte bien rester dans la course. Et nul doute que d'autres startups talentueuses viendront lui disputer le titre de meilleur "oracle électoral". La démocratie n'a pas fini d'être bousculée par l'intelligence artificielle.