Prédire le millésime parfait du capital-risque canadien
Le capital-risque canadien traverse une période tumultueuse ces dernières années. Les fonds peinent à lever des capitaux, avec seulement 500 millions de dollars récoltés en 2023, contre 7 milliards en 2021 lors de l'ère des taux zéro. Pourtant, tel un grand cru qui se bonifie avec le temps, ce millésime difficile pourrait donner naissance aux meilleures performances de l'histoire. Décryptage d'un écosystème en pleine mutation.
La loi des cycles : retour à l'essentiel pour le VC canadien
Comme le souligne justement Josh Scott, spécialiste du secteur, l'ambiance est morose chez les gestionnaires et investisseurs en capital-risque. Les levées de fonds se font rares en cette année 2023, très loin des records de 2021 et 2022 portés par l'euphorie des taux bas. Mais les marchés, y compris le VC, sont cycliques par nature.
Le prochain assouplissement monétaire, attendu d'ici peu, devrait redonner des couleurs à l'écosystème. Pour John Rikhtegar, directeur du capital chez RBCx, cette pénurie de capitaux est en réalité une formidable opportunité. Seuls les meilleurs entrepreneurs et financiers parviendront à capter ces ressources limitées. De quoi bâtir des portefeuilles aux rendements exceptionnels.
Lorsque moins de capitaux sont alloués à une classe d'actifs, cela signifie fondamentalement que seuls les meilleurs fondateurs et les meilleurs investisseurs auront accès à ces fonds, et seront donc en mesure de produire certains des millésimes de capital-risque les plus performants jamais enregistrés.
John Rikhtegar, RBCx
Linda Lifetech : cap sur l'international pour révolutionner le dépistage du cancer du sein
Illustration concrète de cette quête d'excellence : Linda Lifetech. Cette pépite brésilienne, qui a transféré son siège au Canada, développe une technologie unique de dépistage précoce du cancer du sein. Basée sur l'intelligence artificielle et l'imagerie infrarouge, elle offre une alternative rapide, sûre et non invasive aux mammographies pour les femmes jeunes.
Son fondateur Rubens Fernando Mendrone a fait le pari de l'internationalisation pour propulser sa solution de rupture. Un choix payant, puisque Linda Lifetech vient de boucler un tour de table de 2,6 millions de dollars canadiens pour accélérer son déploiement outre-Atlantique.
L'Accelerator Center reste fidèle à ses racines avec Ruth Casselman
Autre signe fort : la nomination de Ruth Casselman à la direction générale de l'Accelerator Center de Kitchener-Waterloo, l'un des incubateurs les plus reconnus au pays. Ancienne pensionnaire devenue directrice par intérim en mars dernier, elle incarne parfaitement la méritocratie et le retour aux sources de la structure, qui a accompagné plus de 750 startups depuis 2006.
Sa feuille de route parle d'elle-même : 1,8 milliard de dollars d'investissements levés par les pépites de l'AC sur les 5 dernières années. Pas de doute, Ruth Casselman saura flairer les futurs champions technologiques canadiens, même dans ce contexte difficile.
Les vrais défis de l'IA pour les startups SaaS
Enfin, impossible d'évoquer l'innovation sans parler d'intelligence artificielle. Véritable raz-de-marée, elle chamboule profondément le paysage des startups, notamment dans le SaaS. Beaucoup se sentent contraintes de devenir des "entreprises IA" pour attirer les faveurs des investisseurs.
Un écueil contre lequel met en garde Scott Loong, partner chez Panache Ventures. Selon lui, il faut distinguer les startups qui créent de l'IA de celles qui l'utilisent de façon plus périphérique. Seules les premières pourront tirer leur épingle du jeu et justifier les valorisations mirobolantes de l'IA. Les autres devront se concentrer sur leur proposition de valeur intrinsèque.
Conclusion : un millésime 2023 prometteur pour le VC canadien
Malgré les vents contraires, le cru 2023 du capital-risque canadien s'annonce donc excellent. Certes, les fonds se raréfient, mais c'est dans l'adversité que se révèlent les vrais talents. Entrepreneurs visionnaires, investisseurs aguerris, startups de rupture : tous les ingrédients sont réunis pour bâtir des licornes de classe mondiale.
Comme un grand vin, le VC canadien a besoin de cette maturation pour libérer tout son potentiel. Aux audacieux de capter dès maintenant les pépites du millésime. Dans 5 ou 10 ans, nous trinquerons au succès de ceux qui ont su garder le cap dans la tempête !