Quand Y Combinator valide la duplication de startups

Le rêve de la Silicon Valley ? Bâtir une startup tech si unique qu'elle bouleverse l'univers économique et transforme ses fondateurs en milliardaires. Intégrer le mythique incubateur Y Combinator fait souvent partie de ce rêve. Airbnb, Coinbase, Stripe... tous y ont fait leurs débuts.

Pourtant, en examinant de près les données des quelque 5000 entreprises soutenues par YC, on découvre une réalité étonnante : les startups YC n'ont pas besoin d'être si uniques. Loin de là.

Quand Y Combinator adoube les produits similaires

YC accepte régulièrement des startups développant des produits très proches, voire quasi-identiques à ceux d'anciens diplômés YC. Parfois concurrents directs, d'autres se différencient légèrement en ciblant une nouvelle zone géographique (Asie, Amérique Latine...) ou un sous-ensemble d'un marché plus vaste (logiciels de point de vente pour bars vs cafés).

C'est la startup d'analyse de données Deckmatch qui a mené cette recherche, inspirée par la controverse PearAI. Cette startup soutenue par YC fut accusée de n'être qu'un clone d'un autre produit YC, Continue. Son fondateur l'a essentiellement admis. D'autres raisons ont mis Pear dans l'eau chaude, mais la conclusion fut la promesse de tout recommencer de zéro.

Le PDG de YC, Garry Tan, a défendu Pear en postant : "Plus de choix c'est bien, construire c'est bien, si vous n'aimez pas, n'utilisez pas". Un mantra qu'il applique lui-même, ayant par exemple soutenu deux startups de caméras corporelles policières à quelques années d'intervalle : Flock Safety et Abel Police.

L'IA, terreau fertile pour les duplicatas

Dans la même veine, plus d'une douzaine de startups d'éditeurs de code IA sont passés par YC entre 2022 et 2024, parfois dans la même promotion avec le même partenaire YC. Autres exemples :

• Assistants IA de réunions : Circleback, Onward, Sonnet, Spinach AI...
• Assistants juridiques IA : Dioptra, Leya, Tower...
• CRM et vente IA, développement très actif : Apten, Persana, Topo...

Restaurants et paiements, autres catégories prisées

Les systèmes de point de vente pour restaurants ont aussi la cote, avec Avocado, Dripos ou la latina Polo entre 2020 et 2023. Nick Evans, co-fondateur d'Avocado et ancien de Tile, approuve cette approche :

C'est stupide de ne pas investir dans des sociétés concurrentes. Vous ne vous battez pas contre les autres startups.

Nick Evans, co-fondateur d'Avocado

Les startups de finance/paye d'entreprise se sont multipliées suite au succès de Gusto et Rippling : Warp, Zeal...

A l'inverse, les plateformes de trading crypto et les cartes de dépenses pro, en vogue de 2018 à 2022, suscitent moins les convoitises.

Y Combinator mise sur les fondateurs plus que les idées

Interrogé sur cette propension à soutenir des concurrents, YC déclare se focaliser sur le potentiel des fondateurs plus que leurs idées business :

Notre stratégie d'investissement se concentre sur le soutien aux fondateurs les plus prometteurs, avec une vision, de la résilience et une capacité d'exécution, quel que soit leur secteur.

Un porte-parole de Y Combinator

Un positionnement en phase avec la Silicon Valley, où beaucoup considèrent qu'une équipe talentueuse primera toujours, même avec une idée moyenne. Quitte à donner sa chance à plusieurs startups sur des créneaux proches, voire identiques ?

Une chose est sûre, chez Y Combinator, il y a de la place pour plusieurs. Aux fondateurs de saisir cette chance pour, peut-être, réaliser leur rêve.