Rallonger les navires de croisière : la méthode qui rapporte gros
Imaginez un instant qu'on vous dise qu'il est possible de rallonger un navire de croisière géant en le découpant littéralement en deux pour y insérer une nouvelle section au milieu. Cela peut sembler totalement fou, et pourtant c'est exactement ce que font les opérateurs de croisière grâce à une technique appelée la "jumboïsation". Une opération chirurgicale à grande échelle qui leur permet d'augmenter drastiquement la capacité et la rentabilité de leurs bateaux.
La jumboïsation, ou comment agrandir les paquebots pour booster les profits
Face à une demande toujours croissante pour les croisières, les compagnies cherchent en permanence des moyens d'augmenter le nombre de passagers qu'elles peuvent embarquer. Construire de nouveaux navires prend du temps et coûte extrêmement cher. C'est là qu'intervient la jumboïsation.
Cette technique consiste à couper un navire existant en deux, pour y insérer une nouvelle section préfabriquée de 24 à 40 mètres de long en moyenne. Cela permet d'ajouter des dizaines ou des centaines de cabines supplémentaires. L'opération transforme radicalement les capacités du navire à générer du chiffre d'affaires, pour un coût bien inférieur à la construction d'un nouveau paquebot.
Pour un coût moyen d'environ 80 millions de dollars et seulement quelques mois hors service, les opérateurs peuvent ajouter suffisamment de cabines premium pour rentabiliser toute l'opération en quelques années seulement.
Un chantier naval d'une extrême précision
La jumboïsation est une véritable prouesse d'ingénierie navale qui ne laisse aucune place à l'erreur. Tout commence par la conception de la nouvelle section à insérer, en se basant sur les plans initiaux du navire. Des centaines de mesures sont prises à bord pour s'assurer que tout s'emboîtera parfaitement.
Une fois la section intermédiaire construite, avec tout son ameublement intérieur, le navire est amené en cale sèche. Il est précisément positionné au-dessus d'une multitude de vérins hydrauliques capables de soulever et déplacer latéralement les différentes parties du bateau qui pèse des milliers de tonnes.
Vient ensuite l'étape cruciale : la découpe du navire en deux, réalisée au millimètre près par des machines automatisées et des ouvriers hautement qualifiés. Les deux moitiés sont ensuite écartées pour laisser la place à la nouvelle section qui est insérée au milieu et soudée.
Des exemples spectaculaires de jumboïsation
Depuis les années 1970, ce sont des dizaines de navires de croisière qui ont été rallongés grâce à la jumboïsation. Des opérations souvent spectaculaires, comme pour le MSC Armonia agrandi de 24 mètres en insertion une section complète avec piscine et toboggans.
Même le plus long navire du monde, le Seawise Giant de 458 mètres, doit une partie de sa taille démesurée à la jumboïsation. Mais tous ces records pourraient bientôt être battus. Le nouveau géant des mers Icon of the Seas pourra embarquer près de 10 000 passagers grâce à ses 20 ponts !
La course au gigantisme des navires de croisière
Si la jumboïsation permet indéniablement aux compagnies d'augmenter la rentabilité de leur flotte, elle soulève aussi des questions. Voulons-nous vraiment voir des navires toujours plus gros, tels de véritables villes flottantes surchargées ?
- Des navires géants de plus en plus difficiles à manœuvrer et à amarrer dans les ports.
- Une consommation de carburant et des émissions de CO2 démultipliées.
- Le risque de transformer les escales en véritable débarquement de masse pour les villes.
La jumboïsation est sans conteste une prouesse technique fascinante. Mais il est important que l'expansion des navires de croisière reste raisonnée et raisonnable. Pour que le succès économique de la croisière ne se fasse pas au détriment de l'environnement et des populations locales.
