Super Micro, la star de l’IA rattrapée par les fraudes ?
L'essor spectaculaire de l'intelligence artificielle générative a propulsé de nombreuses entreprises technologiques sur le devant de la scène ces derniers mois. Parmi elles, Super Micro Computer, un fabricant américain de serveurs informatiques optimisés pour l'entraînement et l'inférence des modèles d'IA. Mais cette success story pourrait bien tourner court. Le groupe fait face à de lourdes accusations de fraude comptable et risque une exclusion du Nasdaq.
Une croissance fulgurante grâce à l'IA
Longtemps restée dans l'ombre, la société Super Micro a vu son activité exploser avec l'engouement autour des IA génératives comme ChatGPT. Ses serveurs intégrant de nombreuses cartes graphiques (GPU) sont en effet très demandés pour faire tourner ces modèles gourmands en puissance de calcul. Résultat : en l'espace de trois exercices fiscaux, son chiffre d'affaires est passé de 3,6 à 14,9 milliards de dollars.
En Bourse, la trajectoire a été encore plus spectaculaire. L'action Super Micro a été multipliée par près de 40 entre fin 2022 et mars 2023, atteignant un pic à 119 dollars peu après l'entrée de l'entreprise au sein du prestigieux indice S&P 500. Une envolée portée par la ruée des investisseurs vers les valeurs exposées à l'IA.
De lourdes accusations de fraude
Mais depuis cet été, c'est la douche froide pour Super Micro. Mi-août, le fonds activiste Hindenburg Research, connu pour miser sur la baisse des actions, a publié un rapport au vitriol. Il y accuse l'entreprise de fraude comptable et affirme qu'elle continue à vendre ses serveurs en Russie malgré les sanctions américaines. Des allégations démenties par Super Micro, mais qui ont fait plonger le titre, retombé autour de 25 dollars.
Fin octobre, nouveau coup dur avec la démission fracassante du cabinet d'audit Ernst & Young, à peine embauché par Super Micro. Dans un courrier, les auditeurs expliquent ne pas vouloir valider les états financiers du groupe, sans plus de précision. De quoi alimenter les soupçons sur d'éventuelles malversations.
Un avenir incertain au Nasdaq
Ces déboires placent Super Micro dans une position délicate vis-à-vis du Nasdaq. Le fabricant a en effet déjà reporté la publication de ses comptes annuels et doit présenter d'ici la semaine prochaine un plan pour se mettre en conformité avec les règles de la Bourse. Faute de quoi, il s'expose à une radiation, comme ce fut déjà le cas en 2019.
Une telle exclusion aurait de lourdes répercussions pour Super Micro. Outre le coup dur en termes d'image, cela pourrait inciter ses clients à se tourner vers des concurrents comme Dell ou HPE. Sur le plan financier, le groupe craint d'avoir à rembourser par anticipation 1,7 milliard de dollars de dettes, alors qu'il ne dispose que de 2,1 milliards de trésorerie.
Ironie du sort, c'est au moment où le marché des serveurs et cartes graphiques pour l'IA s'envole que Super Micro traverse la pire crise de son histoire. Son parcours illustre les excès de la hype autour de l'IA générative, qui a poussé certains acteurs à prendre des libertés avec les règles pour surfer sur la vague. Reste à voir si Super Micro pourra rebondir ou si ses déboires marqueront durablement les esprits.