Thales gèle les recrutements d’ingénieurs en France
Le géant français de l'électronique et de la défense Thales crée la surprise en annonçant un gel de ses recrutements d'ingénieurs dans l'Hexagone et outre-Manche. Une note interne, qui a fuité cet été, détaille les contours de cette décision inattendue. Quelles en sont les raisons ? Comment réagissent les organisations syndicales ? Décryptage.
Privilégier la mobilité interne et les centres de compétences à l'étranger
Dans sa note, la direction de Thales indique vouloir donner la priorité aux redéploiements de salariés en interne, notamment en provenance de sa coentreprise Thales Alenia Space, spécialisée dans les activités spatiales et en proie à des difficultés. Le groupe entend ainsi pouvoir réaffecter des ingénieurs vers d'autres activités porteuses.
Mais ce qui inquiète particulièrement les syndicats, c'est la mention du renforcement en parallèle des centres de compétences en ingénierie de Thales basés en Inde et en Roumanie. Marc Cruciani, de la CFE-CGC, s'interroge :
Que viennent faire dans cette note les centres de compétences en ingénierie d'Inde et de Roumanie ? La globalisation de tous les sujets dans ce document rend les choses beaucoup moins claires.
Marc Cruciani, CFE-CGC Thales
Le spectre d'une vague de délocalisations ?
Pour les représentants du personnel, difficile en effet de ne pas y voir les prémices d'un transfert à terme de l'activité d'ingénierie vers des pays à plus faible coût de main d'œuvre. Une perspective qui fait figure d'épouvantail dans un contexte social tendu.
La direction se veut rassurante et parle d'une mesure temporaire. Elle met en avant la nécessité de maîtriser la masse salariale dans un contexte économique complexe post-Covid. Mais pour combien de temps ce gel des embauches va-t-il durer ?
L'inquiétude monte chez les ingénieurs
Même si Thales promet qu'il n'y aura pas de suppressions de postes, l'annonce passe mal auprès des salariés concernés. Beaucoup craignent un coup d'arrêt durable pour leur carrière et redoutent des mobilités forcées.
Les jeunes diplômés risquent aussi de faire les frais de cette décision, eux qui espéraient intégrer un grand groupe reconnu. Les écoles d'ingénieurs partenaires s'inquiètent déjà d'un retournement du marché de l'emploi dans la filière électronique et informatique.
Des questions en suspens
Au final, ce choix de Thales pose question. Le groupe, bien que challenged comme tout le secteur, affiche de bons résultats financiers et de belles perspectives, notamment dans la défense et la cybersécurité. De quoi s'interroger sur l'opportunité d'un tel coup de frein sur les recrutements.
Les syndicats réclament des explications claires à la direction sur sa stratégie. Certains dénoncent un manque de transparence et un double discours, entre communication rassurante et réalité des arbitrages. Affaire à suivre donc, alors que les négociations sur la gestion prévisionnelle des emplois et compétences doivent bientôt débuter.