
Turbine Récolte 22M$ pour Libérer la Liquidité des VC
Imaginez-vous dans la peau d’un investisseur audacieux : vous avez placé des millions dans des fonds de capital-risque, mais depuis quelques années, l’argent ne revient plus aussi vite qu’avant. Les IPO se font rares, les exits traînent, et vos liquidités s’amenuisent. Que faire ? Vendre vos parts à perte ou attendre un hypothétique rebond ? C’est dans ce contexte qu’une startup américaine, Turbine, entre en scène avec une idée aussi simple que brillante : débloquer la valeur de vos investissements sans vous forcer à lâcher prise.
Une Solution pour les Investisseurs en Mal de Cash
Depuis que le marché des introductions en bourse s’est essoufflé, les **limited partners** (ou LP), ces investisseurs qui financent les fonds de venture capital (VC), se retrouvent dans une situation délicate. Les rendements tardent à se matérialiser, et pour certains, comme les family offices ou les particuliers fortunés, cela devient un casse-tête. Turbine, une jeune pousse fintech, propose une alternative séduisante : un produit de crédit qui utilise les parts dans les fonds comme garantie, un peu comme une ligne de crédit hypothécaire, mais pour le monde du VC.
L’Origine d’une Idée Nécessaire
L’histoire de Turbine commence avec Mike Hurst, un entrepreneur qui connaît bien les hauts et les bas de la tech. Après avoir vendu sa startup de paiements, Exactuals, en 2018, il a investi une partie de ses gains dans des fonds VC et des actions technologiques. Mais en 2022, lorsque le marché s’est effondré, il s’est retrouvé coincé : les appels de capitaux des fonds continuaient, mais ses liquidités fondaient. Refusant de vendre ses actions Amazon à bas prix ou de s’endetter lourdement, il a imaginé une solution qui pourrait bénéficier à des milliers d’investisseurs dans sa situation.
“Je ne voulais pas hypothéquer ma maison ou vendre mes actions à perte alors que je savais qu’elles remonteraient.”
– Mike Hurst, fondateur de Turbine
Cette expérience personnelle a donné naissance à Turbine, une plateforme qui sort de l’ombre en avril 2025 avec une levée de fonds de **22 millions de dollars**, soutenue par des acteurs majeurs comme Alpha Edison et TTV Capital. Mais ce n’est pas tout : la startup a aussi sécurisé une ligne de dette de 100 millions de dollars auprès de Silicon Valley Bank pour financer ses prêts.
Comment Fonctionne Turbine ?
Le concept est aussi ingénieux qu’intuitif. Turbine permet aux LP d’emprunter en utilisant la valeur actuelle de leurs parts dans des fonds VC comme **collatéral**. Prenons un exemple concret : si vous avez investi 3 millions de dollars dans un fonds qui vaut aujourd’hui 10 millions, vous pouvez emprunter sur cette valorisation sans renoncer à vos gains futurs. C’est une sorte de *home equity line* pour le capital-risque, mais sans les murs ni les tuiles.
Le taux d’intérêt ? Environ **9 %**, ce qui peut sembler élevé dans un monde où le taux préférentiel avoisine les 7,5 %. Pourtant, pour beaucoup, c’est une aubaine comparé à la décote qu’ils subiraient en vendant leurs parts sur le marché secondaire. Turbine offre ainsi une flexibilité inédite, et ses premiers clients – les cinq fonds qui ont investi dans sa levée – en sont déjà convaincus.
Un Besoin Criant dans l’Écosystème VC
Le manque de liquidité n’est pas un problème nouveau, mais il s’est aggravé ces dernières années. Les LP, qu’ils soient des institutions ou des individus, ont souvent peu d’options lorsqu’ils ont besoin de cash. Vendre des parts sur le marché secondaire ? Possible, mais cela implique souvent une perte significative. Demander aux fonds de vendre des actifs ? Pas toujours réalisable, surtout si cela ne sert qu’un seul investisseur.
“J’ai eu des LP qui me demandaient des solutions de liquidité, mais je ne pouvais pas vendre un actif juste pour un seul d’entre eux.”
– Gardiner Garrard, co-fondateur de TTV Capital
Turbine répond à ce dilemme en offrant une porte de sortie élégante. Les fonds n’ont pas à se séparer de leurs pépites, et les LP accèdent à des fonds sans sacrifier leur position. Une équation gagnant-gagnant qui pourrait bien redéfinir les règles du jeu.
Les Avantages et les Limites du Modèle
Le principal atout de Turbine, c’est la **préservation de l’upside**. En évitant de vendre, les investisseurs conservent leur exposition aux succès futurs des startups dans lesquelles leurs fonds ont misé. Mais ce n’est pas sans coût. Avec un taux d’intérêt de 9 %, le prêt doit être bien calibré pour ne pas devenir un fardeau. Cela dit, comparé à une vente à perte ou à une décote de 20 à 30 % sur le marché secondaire, l’option reste séduisante.
- Accès rapide à des liquidités sans vendre ses parts.
- Préservation des gains potentiels à long terme.
- Taux d’intérêt compétitif face aux alternatives.
Côté limites, le modèle repose sur la valorisation des fonds, qui peut fluctuer. Si le marché chute, la garantie pourrait perdre de sa valeur, rendant le prêt plus risqué pour Turbine et ses créanciers. Un équilibre délicat à maintenir.
Une Révolution pour les Fonds et leurs LP
Pour les fonds de venture capital, Turbine est une aubaine. Les general partners (GP) peuvent désormais proposer une solution concrète à leurs LP en quête de liquidité, sans perturber leur stratégie d’investissement. Les cinq fonds investisseurs – Alpha Edison, TTV Capital, Fin Capital, B Capital et Sozo Ventures – l’ont bien compris et ont déjà intégré l’offre à leurs portefeuilles.
Mais Turbine ne compte pas s’arrêter là. Après cette première phase, la startup ambitionne d’élargir son réseau et de séduire davantage de fonds VC. Une expansion qui pourrait transformer la manière dont les LP gèrent leurs engagements financiers dans un secteur souvent imprévisible.
Et Après ? L’Avenir de la Liquidité en VC
Si Turbine réussit à s’imposer, elle pourrait ouvrir la voie à une nouvelle ère pour le capital-risque. Les LP gagneraient en flexibilité, les fonds en stabilité, et l’écosystème tout entier en résilience. Mais des questions demeurent : ce modèle peut-il tenir sur le long terme face à des marchés volatils ? Et quid des petits investisseurs, qui n’ont pas forcément des millions à mettre en garantie ?
Pour l’instant, Turbine apporte une réponse pragmatique à un problème bien réel. Avec ses 22 millions de dollars et son approche novatrice, elle s’inscrit dans une vague de startups fintech qui repensent les rouages de la finance. Une chose est sûre : dans un monde où la liquidité est reine, cette jeune pousse a toutes les cartes en main pour faire parler d’elle.