Une startup révolutionne l’approvisionnement en carburant pour la fusion nucléaire
Imaginez un monde où l'énergie serait abondante, propre et quasiment illimitée. C'est la promesse de la fusion nucléaire, qui cherche à reproduire sur Terre les réactions qui alimentent le Soleil et les étoiles. Mais pour concrétiser ce rêve, les futures centrales à fusion devront surmonter un défi de taille : s'approvisionner en quantités suffisantes de tritium, un isotope rare de l'hydrogène essentiel comme carburant. C'est là qu'intervient Marathon Fusion, une startup restée jusqu'ici dans l'ombre, qui pense avoir trouvé une solution à ce problème.
Un élément clé mais une ressource limitée
Le tritium, avec le deutérium, constitue le mélange idéal pour alimenter les réacteurs à fusion. Mais alors que le deutérium est abondant dans l'eau de mer, le tritium est extrêmement rare. Selon Kyle Schiller, PDG de Marathon Fusion :
Il n'y a actuellement que 20 kilogrammes de tritium disponibles dans le monde. Une seule centrale à fusion à l'échelle commerciale en nécessitera quelques kilogrammes juste pour démarrer.
– Kyle Schiller, PDG de Marathon Fusion
Aujourd'hui, le tritium provient des déchets de quelques centrales à fission. Cela suffira pour les premiers réacteurs à fusion, mais les suivants devront produire leur propre carburant, en bombardant du lithium avec les neutrons issus de la réaction. Une partie du tritium ainsi généré sera réinjecté, une autre réservée pour approvisionner de nouvelles centrales. Mais les systèmes actuels de filtration du tritium ne sont adaptés qu'à un usage expérimental. Pour passer à l'échelle industrielle, un bond technologique est nécessaire.
La "superpermeation", une technologie prometteuse
C'est là qu'entre en scène Marathon Fusion, avec son procédé de "superpermeation". Cette technologie utilise des membranes métalliques pour filtrer les impuretés de l'hydrogène. Pressurisé contre la membrane, l'hydrogène la traverse tandis que les autres éléments sont bloqués. Cerise sur le gâteau : l'hydrogène ressort compressé de l'autre côté. Selon Adam Rutkowski, directeur technique :
L'idée est d'obtenir un débit maximal le plus rapidement possible.
– Adam Rutkowski, CTO de Marathon Fusion
La startup travaille depuis deux ans à optimiser cette technique vieille de 40 ans, avec le soutien du Département de l'Énergie américain. Elle vient de lever 5,9 millions de dollars auprès d'investisseurs de renom. Son offre suscite déjà l'intérêt de poids lourds de la fusion comme Commonwealth Fusion Systems et Helion Energy.
Anticiper les besoins de demain
Miser sur une technologie pour des centrales qui n'existent pas encore peut sembler prématuré. Mais Kyle Schiller est confiant dans la cadence des progrès de la fusion :
Si on se réveille un matin en ayant atteint la rentabilité énergétique avec la fusion, on regrettera de ne pas avoir commencé encore plus tôt.
– Kyle Schiller, PDG de Marathon Fusion
Marathon Fusion illustre cette nouvelle génération de startups qui se positionnent sur des enjeux cruciaux pour le déploiement futur de technologies de rupture. En résolvant en amont le problème de l'approvisionnement en tritium, elle pourrait bien avoir un rôle clé à jouer pour faire de la fusion une énergie viable et durable à grande échelle. Une fusion entre ambition technologique et vision long terme, en somme.