
Vergèze Face à la Fermeture de la Verrerie Perrier
Imaginez un village où chaque matin, le cliquetis des bouteilles en verre résonne comme une mélodie industrielle. À Vergèze, dans le Gard, cette symphonie risque de s’éteindre. La récente annonce de la fermeture de la verrerie O-I, fournisseur historique des emblématiques bouteilles vertes de Perrier, a secoué la commune. Avec 164 emplois menacés et des incertitudes pesant sur l’usine d’embouteillage de Perrier, l’avenir économique de la région est en jeu. Comment une petite commune du sud de la France peut-elle rebondir face à une telle crise ?
Une Double Menace sur l’Économie Locale
La verrerie O-I, implantée à Vergèze depuis des décennies, n’est pas qu’une usine : c’est un pilier économique et culturel. En avril 2025, l’annonce de la suppression de ses 164 postes a créé une onde de choc. Mais ce n’est pas tout. L’usine Perrier, propriété de Nestlé Waters, fait face à ses propres défis, notamment la possible perte de son label eau minérale naturelle. Ces deux coups durs menacent de redessiner le paysage économique de la région.
La Verrerie O-I : Une Fermeture Inattendue
La décision de l’américain Owens-Illinois (O-I) de fermer la verrerie de Vergèze a surpris tout le monde, y compris la maire, Pascale Fortunat-Deschamps. Pourtant, l’usine affiche une profitabilité de 7 %, un chiffre enviable dans l’industrie. Alors, pourquoi fermer ? Les syndicats pointent une baisse de la demande de Perrier pour les grands formats de bouteilles, réduisant le tonnage de verre produit de 80 000 à 56 000 tonnes par an.
L’entreprise est rentable, mais la baisse des commandes de Perrier a fait grimper nos coûts de production. C’est un cercle vicieux.
– Jacky Cortier, représentant CGT
À cela s’ajoute une réorientation stratégique de Perrier vers du verre blanc pour sa gamme Maison Perrier, fabriqué ailleurs, à Puy-Guillaume. Ce changement a coûté 24 000 tonnes de production à la verrerie. O-I évoque aussi un marché du verre en difficulté, marqué par un ralentissement dans le secteur du vin et une concurrence accrue.
Perrier : Un Label en Péril
Si la verrerie est en crise, l’usine Perrier n’est pas épargnée. Depuis plusieurs mois, des contaminations bactériennes répétées dans les captages d’eau ont fragilisé la marque. En avril 2024, Nestlé a détruit 2 millions de bouteilles par précaution. Plus récemment, l’Agence régionale de santé (ARS) Occitanie a recommandé l’arrêt de la production d’eau minérale naturelle, remettant en cause l’utilisation de microfiltres non conformes.
Perdre ce label serait un coup dur pour Perrier, dont la réputation repose sur la pureté de son eau. Une décision du préfet du Gard, attendue d’ici juin 2025, pourrait sceller le sort des 1 000 emplois de l’usine. Pour les habitants, c’est une question d’identité autant que d’économie.
Perrier, c’est notre histoire, notre fierté. Sans le label, ce ne sera plus la même usine.
– Claude Serrano, ancien employé de Perrier
Les Impacts Économiques et Sociaux
La fermeture de la verrerie et les incertitudes autour de Perrier touchent bien au-delà des employés. Vergèze bénéficie d’une taxe sur les eaux minérales, qui injecte jusqu’à 1 million d’euros par an dans les caisses communales. Sans cette manne, les infrastructures locales, comme les écoles ou les équipements sportifs, pourraient souffrir.
Le chômage, déjà à 10 % dans le Gard, risque de grimper. D’autres entreprises locales, comme Royal Canin à Aimargues (100 suppressions de postes) ou Eminence (60 emplois menacés), accentuent la pression sur le marché du travail. Pour les habitants, perdre ces industries, c’est perdre une partie de l’âme de la région.
Une Mobilisation Collective
Face à cette crise, Vergèze ne baisse pas les bras. Les syndicats de la verrerie, menés par la CGT et FO, misent sur la recherche d’un repreneur. Ils vantent les atouts du site : une logistique optimisée, un savoir-faire reconnu et une capacité à innover, comme la réduction du poids des bouteilles pour Heineken.
- Profitabilité de 7 %, rare dans l’industrie verrière.
- Livraison ultra-rapide à Perrier en 1h30.
- Innovations dans la légèreté des bouteilles.
La maire, Pascale Fortunat-Deschamps, appelle à une mobilisation collective, soutenue par des élus locaux et nationaux. Une réunion avec les syndicats et une interpellation du ministre de l’Économie par le député Nicolas Meizonnet témoignent de cette dynamique.
Vers une Transition Écologique ?
Et si cette crise était une opportunité pour repenser l’industrie locale ? Le verre, matériau recyclable à l’infini, est au cœur des enjeux de l’économie circulaire. Un repreneur pourrait investir dans des technologies plus durables, comme des fours à basse consommation, pour relancer la verrerie. De son côté, Nestlé Waters a annoncé un investissement de 40 millions d’euros pour moderniser l’usine Perrier et se conformer aux normes sanitaires.
Des start-ups spécialisées dans le recyclage ou les matériaux biosourcés pourraient aussi trouver leur place à Vergèze. Par exemple, des entreprises comme *Carbios*, qui recycle le PET par enzymologie, montrent que l’innovation peut revitaliser des territoires industriels.
Les Défis de la Réindustrialisation
La crise de Vergèze pose une question plus large : comment réindustrialiser la France tout en préservant l’emploi ? La relocalisation, souvent vantée, bute sur des réalités complexes : concurrence mondiale, coûts de production, et parfois, manque d’investissement. À Vergèze, le sous-investissement chronique d’O-I dans la verrerie, notamment pour moderniser son four, illustre ce défi.
Pourtant, des solutions existent. Voici quelques pistes pour l’avenir :
- Partenariats public-privé pour financer la modernisation des usines.
- Incitation fiscale pour les entreprises investissant dans le recyclage.
- Formation des salariés aux métiers de l’économie verte.
Le gouvernement pourrait jouer un rôle clé en soutenant ces initiatives, comme il l’a fait pour d’autres fleurons industriels.
Un Avenir à Réinventer
Vergèze se trouve à un carrefour. La fermeture de la verrerie et les défis de Perrier sont des alertes, mais aussi des opportunités pour réinventer l’industrie locale. En misant sur l’innovation, la durabilité et la mobilisation collective, la commune peut transformer cette crise en tremplin.
Les habitants, les syndicats et les élus sont unis pour préserver leur patrimoine industriel. Comme le dit Santiago Bruno, de la CGT : « Notre savoir-faire est unique. Il faut juste quelqu’un pour y croire. » À Vergèze, l’espoir persiste, porté par une communauté prête à écrire un nouveau chapitre.