Gaussin, la gouvernance tchèque au service de l’innovation logistique
Peut-on booster l'innovation en changeant de gouvernance ? C'est le pari que fait Gaussin, constructeur français de véhicules logistiques. En passant sous pavillon tchèque, le groupe entend recentrer ses activités pour accélérer son développement. Un virage stratégique qui soulève des questions sur l'avenir de ce fleuron tricolore.
Gaussin, un spécialiste de la logistique en quête de stabilité
Basé à Héricourt en Haute-Saône, le groupe Gaussin conçoit et assemble des véhicules électriques et à hydrogène dédiés à la manutention et au transport de marchandises. Avec 400 salariés et 35,7 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2023, l'entreprise s'est forgée une solide expertise dans le domaine de la logistique intelligente et autonome.
Mais ces dernières années, Gaussin a connu quelques turbulences. Des désaccords stratégiques au sein de la direction ont entraîné une crise de gouvernance qui fragilisait le groupe. Pour y remédier, la solution est venue de l'Est, avec l'entrée au capital du tchèque CSG.
Un changement de gouvernance validé par Bercy
Le 18 juin 2024, un conseil d'administration a officialisé la prise de contrôle de Gaussin par CSG. Le groupe tchèque détient désormais 20% du capital et 4 sièges sur 5 au conseil. Christophe Gaussin, l'ancien PDG, reste directeur général mais perd la présidence au profit d'un représentant de CSG.
Cette opération capitalistique avait reçu en avril le feu vert de Bercy, qui considère Gaussin comme une activité stratégique. Le gouvernement a posé comme conditions le maintien des emplois et des savoir-faire en France. Si CSG convertit son prêt de 15 millions d'euros en actions, il pourrait même devenir majoritaire.
L'arrivée de quatre nouveaux administrateurs s'est accompagnée de la fin de mission de deux anciens responsables qui participaient à une crise de gouvernance. La situation devrait être plus apaisée.
– Arthur Denez, porte-parole de Gaussin
Un recentrage stratégique pour assainir la situation
Avec ce changement de gouvernance, Gaussin opère un recentrage sur son cœur de métier : les véhicules logistiques et portuaires. Le groupe se désengage ainsi de certaines activités jugées moins stratégiques :
- Cession de sa filiale Gama, spécialisée dans la mobilité autonome, à son partenaire japonais Macnica.
- Mise en pause des projets liés à l'hydrogène.
- Retrait de l'activité tunnelière de Métalliance, tout en conservant la logistique sur le site de Saint-Vallier.
Ces cessions permettent à Gaussin de faire rentrer du cash pour assainir sa situation financière. Le groupe présentera en septembre prochain au tribunal de commerce son plan de continuation, axé sur le recentrage et le désendettement.
Quel avenir pour ce fleuron français de la logistique ?
Le passage sous gouvernance tchèque soulève des interrogations sur l'avenir de Gaussin. Même si les emplois et le savoir-faire doivent rester dans l'Hexagone, certains craignent un affaiblissement de la souveraineté industrielle française dans un secteur clé.
D'autres y voient une opportunité de donner un nouveau souffle à l'entreprise, en clarifiant sa stratégie et en renforçant ses moyens financiers. CSG a en effet injecté 15 millions d'euros en prêt pour sécuriser la production de véhicules destinés à un gros client américain.
Une chose est sûre : du haut de ses 140 ans, le groupe familial Gaussin se retrouve à un tournant de son histoire. Il doit réussir sa mue pour rester un acteur majeur de l'innovation logistique en France et en Europe. La gouvernance tchèque parviendra-t-elle à préserver cet héritage tout en accélérant son développement à l'international ? Les prochains mois seront décisifs.