La Fermeture de l’Abattoir AIM : Un Gâchis Scandaleux ?
L'abattoir AIM à Antrain, en Ille-et-Vilaine, vient de fermer définitivement ses portes suite à une décision du tribunal de commerce de Rennes. Cette liquidation judiciaire jette 57 salariés au chômage et fragilise encore un peu plus la filière viande déjà en crise. Pourtant, l'établissement avait bénéficié de généreuses subventions publiques ces dernières années pour se moderniser. Alors, ce fiasco industriel était-il vraiment inévitable ? Éclairage sur les dessous d'un gâchis économique et social.
Des subventions publiques en pure perte ?
En 2021, dans le cadre du plan France Relance, l'abattoir AIM avait perçu une subvention de 1,6 million d'euros pour financer des travaux de modernisation. Un an plus tard, c'est EDF qui lui octroyait 3 millions d'euros supplémentaires. Des sommes conséquentes qui auraient dû permettre de pérenniser l'activité. Mais visiblement, l'argent public n'a pas été utilisé à bon escient.
C'est un gâchis scandaleux. L'actionnaire principal a laissé pourrir la situation.
Marc Boulmer, secrétaire général CGT
Une rentabilité en trompe-l'œil
Pourtant, les comptes de l'abattoir AIM pouvaient laisser penser que l'entreprise se portait bien. En 2023, le chiffre d'affaires avait ainsi bondi de 19 millions d'euros. Une hausse significative liée au fait que l'établissement était l'un des rares à fonctionner 5 jours sur 5. Mais cette rentabilité apparente masquait une tout autre réalité.
Les actifs ont été pillés progressivement pour valoriser d'autres entités du groupe Sopraco.
Me Elise Brand, avocate des salariés
Un manque de transparence fatal
L'avocate des salariés dénonce également l'opacité de la direction belge du groupe Sopraco, propriétaire de AIM depuis 2023. A aucun moment, les représentants du personnel n'auraient été tenus informés des difficultés. Un manque de transparence qui a empêché d'anticiper ce funeste dénouement.
Face à cette situation, les salariés ne comptent pas en rester là. Via leur avocate, ils ont d'ores et déjà annoncé leur intention d'assigner le groupe Sopraco aux prud'hommes. Objectif : faire reconnaître le préjudice subi et obtenir les indemnités qui leur sont dues. Une maigre consolation au regard du traumatisme économique et humain provoqué par cette brutale fermeture.
Une filière viande durablement fragilisée
Car au-delà du site d'Antrain, c'est toute la filière viande qui sort affaiblie de cette liquidation. Depuis plusieurs années, les abattoirs français traversent une crise profonde, pris en étau entre une concurrence internationale féroce et une baisse tendancielle de la consommation de viande. Conséquence : les fermetures et restructurations se multiplient.
Face à ce contexte compliqué, la priorité des pouvoirs publics devrait être d'accompagner la modernisation et la montée en gamme des outils industriels, afin de les rendre plus compétitifs et respectueux du bien-être animal. Mais les subventions, aussi généreuses soient-elles, ne suffiront pas si la gouvernance des entreprises n'est pas irréprochable. Le fiasco de l'abattoir AIM est là pour nous le rappeler cruellement.