L’union de Qwant et Ecosia pour défier Google
Dans le paysage ultra-concurrentiel des moteurs de recherche, dominer par le géant Google, les acteurs européens cherchent des moyens de tirer leur épingle du jeu. C'est dans ce contexte que le français Qwant et l'allemand Ecosia ont décidé d'unir leurs forces pour bâtir ensemble leur propre index de recherche indépendant.
Une alliance européenne inédite pour plus d'autonomie
Qwant et Ecosia ont officialisé le 12 novembre la création d'une coentreprise à 50/50 baptisée "European Search Perspective". L'objectif est clair : développer leur propre index de recherche pour ne plus dépendre des technologies de Google et Microsoft. Jusqu'à présent, Qwant s'appuyait essentiellement sur l'index de Bing (Microsoft), tandis qu'Ecosia utilisait à la fois Bing et Google.
Selon les termes de l'accord, Ecosia apportera des liquidités et de la data, pendant que Qwant fournira ses équipes d'ingénieurs et data-scientists qui planchaient déjà sur un index maison. Les deux partenaires ambitionnent de lancer une première version de cet index dès l'année prochaine, en français et allemand dans un premier temps, avant d'ajouter d'autres langues européennes.
Sortir de la dépendance aux géants américains
Au-delà de l'enjeu technologique, il s'agit pour les deux entreprises de s'émanciper de la mainmise des géants de la Silicon Valley sur le marché de la recherche en ligne. Google y règne en maître avec plus de 90% de parts de marché en Europe, tandis que les alternatives peinent à décoller, à l'image de Qwant (moins de 1% de parts de marché) et Ecosia (0,3%).
Cette situation de dépendance est devenu encore plus problématique l'an dernier lorsque Microsoft a brutalement augmenté les tarifs de son API Bing, mettant en difficulté de nombreux moteurs alternatifs qui en dépendent. Ecosia s'est alors tourné vers Google, mais s'est heurté à l'impossibilité d'utiliser son API sur mobile.
Miser sur une meilleure expérience utilisateur
En développant leur propre index, Qwant et Ecosia comptent donc reprendre le contrôle sur la technologie au cœur de leur activité. Mais ils promettent aussi d'en profiter pour offrir une expérience utilisateur améliorée, en mettant notamment l'accent sur le respect de la vie privée, leur marque de fabrique commune.
Les deux entreprises se distinguent en effet par leur positionnement en faveur de la protection des données personnelles : pas de tracking publicitaire intrusif, pas de profilage, et des serveurs hébergés en Europe. Un contre-pied assumé au modèle dominant de Google basé sur la publicité ciblée.
Tirer parti des nouvelles règles européennes
Pour mener à bien leur projet, Qwant et Ecosia espèrent aussi pouvoir s'appuyer sur le nouveau règlement européen sur les marchés numériques (Digital Markets Act) qui impose des obligations spécifiques aux "gatekeeper" comme Google. Le géant de Mountain View devra notamment permettre aux moteurs alternatifs d'accéder à certaines de ses données de recherche.
Google devra aussi mettre en place un écran de choix du moteur par défaut, sur son navigateur Chrome comme il le fait déjà sur Android suite à une amende record de la Commission européenne. Une opportunité pour Qwant et Ecosia de gagner en visibilité auprès des internautes.
Un pari audacieux mais nécessaire
Malgré ces atouts, l'alliance des deux moteurs part de très loin face à l'ultra-domination de Google. Mais impossible n'est pas français, ni allemand ! En unissant leurs forces et leurs vision, Qwant et Ecosia veulent montrer qu'une alternative européenne crédible est possible dans la recherche en ligne.
Un pari audacieux mais nécessaire pour faire vivre le choix et la diversité sur le web, et ne pas laisser un acteur unique dicter sa loi. Reste à savoir si les internautes européens seront au rendez-vous de cette quête de souveraineté numérique. Les valeurs éthiques et écologiques portées par Qwant et Ecosia réussiront-elles à percer face à la force de frappe technologique de Google ?