Nouveau bouclier thermique pour protéger les vaisseaux spatiaux
Imaginez un vaisseau spatial fendant l'atmosphère terrestre à une vitesse vertigineuse, son bouclier thermique rougeoyant sous l'intense chaleur. C'est précisément ce défi que tentent de relever Oak Ridge National Laboratory et Sierra Space Corporation avec leur nouvelle génération de boucliers thermiques. Une innovation qui pourrait bien révolutionner l'accès à l'espace.
Le plus grand obstacle au retour sur Terre
La rentrée atmosphérique représente sans conteste le plus grand danger pour un vaisseau spatial. L'énorme quantité d'énergie cinétique se transforme en chaleur extrême lors du freinage atmosphérique. Les températures peuvent alors atteindre plusieurs milliers de degrés Celsius, suffisamment pour détruire n'importe quel engin.
Jusqu'à présent, les boucliers thermiques dits "ablatifs" étaient privilégiés. Composés de matériaux plastiques spéciaux comme le phénol, ils fonctionnent en se vaporisant progressivement, emportant la chaleur avec eux. Mais ce procédé implique la destruction du bouclier, qui doit donc être remplacé après chaque vol. Une contrainte majeure pour les vaisseaux réutilisables.
L'héritage des navettes spatiales
Dans les années 80, la NASA avait développé pour ses navettes spatiales un système de protection thermique réutilisable. Il était constitué de milliers de tuiles en céramique de carbure de silicium, capables d'absorber la chaleur puis de la libérer très lentement. Tellement lentement qu'on pouvait les toucher sans se brûler quelques minutes après l'atterrissage !
Mais ces tuiles présentaient de sérieux inconvénients. Leur fabrication était longue et coûteuse, chaque tuile devant être moulée et cuite à plus de 2000°C individuellement. De plus, elles avaient tendance à se détacher en vol, fragilisant dangereusement la protection thermique. Des défauts difficilement compatibles avec des vols fréquents.
Un nouveau design prometteur
C'est en s'inspirant de cette technologie qu'Oak Ridge et Sierra Space ont conçu leurs nouvelles tuiles. Elles combinent fibres de carbone et de carbure de silicium dans un arrangement optimisé, offrant une excellente protection et résistance tout en assurant une stabilité aérodynamique.
Mais la véritable avancée réside dans leur processus de fabrication automatisé et bien moins onéreux. De quoi envisager une cadence de lancements inédite, passant de 5 vols par an pour les navettes à potentiellement 5 par jour ! Ce bond en avant est essentiel pour rendre l'accès à l'espace plus abordable et démocratiser les vols habités.
Bientôt sur le Dream Chaser
Ces tuiles nouvelle génération équiperont le mini-shuttle réutilisable Dream Chaser développé par Sierra Space. Voué à des missions de transport de fret et d'équipage en orbite basse, ce vaisseau au design unique pourrait bien devenir un acteur clé de l'ère spatiale post-ISS.
La clé pour atteindre une cadence de vols rapides avec des temps de rotation réduits entre atterrissage et lancement, c'est la réutilisabilité du système de protection thermique.
Greg Larsen, chercheur principal chez ORNL
Plus qu'une simple évolution, ces nouveaux boucliers thermiques pourraient bien représenter un tournant majeur. S'ils tiennent leurs promesses lors des premiers vols orbitaux du Dream Chaser prévus dès 2024, nul doute qu'ils ouvriront la voie à une nouvelle ère d'accès routinier à l'espace. La clé d'un futur où travailler, faire du tourisme ou même vivre en orbite serait à portée de main.