Quand la concurrence numérique régule le poids des géants tech

Dans un contexte de volonté croissante de réguler le pouvoir des géants du numérique, l'Europe vient de marquer un point. Le Tribunal de Luxembourg a en effet rejeté le recours de ByteDance, propriétaire de TikTok, qui contestait son statut de « contrôleur d'accès » attribué dans le cadre du règlement sur les marchés numériques (DMA) de l'UE. Une décision lourde de conséquences pour la concurrence dans le secteur tech.

Le DMA, un outil puissant pour rééquilibrer le marché numérique

Adopté en 2022, le DMA vise à garantir une concurrence loyale et un plus grand choix pour les consommateurs face aux positions dominantes de certains acteurs. Les entreprises désignées comme « contrôleurs d'accès » doivent ainsi respecter de nouvelles obligations :

• Rendre leurs applications de messagerie interopérables avec celles des concurrents
• Laisser le choix aux utilisateurs des applications pré-installées
• Ne pas favoriser leurs propres services par rapport à ceux des rivaux

ByteDance avait tenté de faire valoir que cette désignation pourrait paradoxalement protéger les acteurs dominants contre de nouveaux entrants comme TikTok. Mais les juges ont considéré que l'entreprise remplissait bien les critères, au même titre que Meta ou Alphabet, au vu de sa valorisation et de son nombre d'utilisateurs dans l'UE.

TikTok déjà dans les starting-blocks pour se conformer

Si ByteDance s'est dit déçu par cette décision, le groupe assure avoir déjà pris des mesures pour respecter ses obligations avant l'échéance de mars dernier. TikTok semble donc prêt à jouer le jeu de la régulation, même si un appel devant la Cour de justice de l'UE reste possible.

Nous allons évaluer les prochaines étapes, mais nous avons déjà agi pour nous conformer au DMA.

Un porte-parole de TikTok

L'Europe affiche sa fermeté face aux géants tech

Au-delà de ByteDance, ce sont tous les GAFAM et autres grandes plateformes qui sont concernés par le statut de contrôleur d'accès : Meta, Alphabet, Amazon, Apple, Microsoft, Booking.com... Autant d'acteurs qui devront se plier aux règles du DMA s'ils veulent continuer à opérer sereinement sur le marché européen.

Cette décision envoie un message clair sur la détermination de l'Europe à faire respecter sa souveraineté numérique. Les amendes prévues en cas de non-respect des obligations, pouvant atteindre 10% du chiffre d'affaires mondial, sont un puissant incitatif. Même les plus grandes entreprises tech devront composer avec ce nouveau cadre réglementaire.

Vers une concurrence plus saine et équitable

Si les géants du numérique s'inquiètent des contraintes imposées par le DMA, de nombreux acteurs y voient une opportunité de rééquilibrer le marché en faveur des plus petits acteurs innovants. En limitant les pratiques anticoncurrentielles des contrôleurs d'accès, l'Europe ouvre la voie à une concurrence plus dynamique et diversifiée.

Les consommateurs devraient également y trouver leur compte, avec un choix élargi de services et une meilleure interopérabilité entre les différentes plateformes. Le parcours utilisateur pourrait s'en trouver fluidifié, sans le verrouillage actuellement imposé par les écosystèmes propriétaires des grands acteurs.

Si la mise en oeuvre concrète du DMA représente encore un défi, cette première victoire de l'Europe face à ByteDance démontre sa capacité à s'imposer comme un régulateur incontournable de l'économie numérique. Une tendance qui devrait s'accentuer pour faire émerger un environnement plus ouvert et équitable, au bénéfice de l'innovation et des utilisateurs.