Royaume-Uni : Lancement d’un portefeuille numérique et chatbot IA
Le gouvernement britannique a annoncé un pas de géant vers la digitalisation de ses services publics, avec le lancement prochain d'un portefeuille numérique permettant de stocker permis de conduire et autres documents d'identité, ainsi que le déploiement d'un chatbot alimenté par l'intelligence artificielle d'OpenAI pour faciliter les interactions des citoyens avec le portail GOV.UK.
Un portefeuille numérique pour dématérialiser ses papiers
Fini le temps où l'on devait trimballer avec soi tout un tas de documents papier ! Le Royaume-Uni compte bien entrer de plain-pied dans l'ère numérique en proposant dès cette année à ses citoyens un "portefeuille numérique" baptisé GOV.UK Wallet. Celui-ci permettra de stocker de manière sécurisée sur son smartphone ses pièces d'identité dématérialisées, à commencer par le permis de conduire et la carte d'ancien combattant.
Selon le secrétaire d'État à la technologie Peter Kyle, l'objectif est de rendre l'accès aux services publics plus pratique et sécurisé. Le portefeuille numérique tirera parti des fonctionnalités de sécurité des smartphones modernes comme la reconnaissance faciale pour s'assurer de l'identité de son propriétaire. Pas question pour autant de rendre son utilisation obligatoire, le gouvernement misant sur l'aspect "pratique et désirable" pour convaincre les citoyens d'adopter ce nouveau service.
"La technologie utilisera des fonctionnalités de sécurité intégrées aux smartphones modernes, notamment des contrôles de reconnaissance faciale similaires à ceux utilisés lors des paiements par carte bancaire numérique", a précisé le gouvernement.
Vérification d'âge en ligne
En plus de la praticité au quotidien, le permis de conduire numérique sera également utilisé pour renforcer la sécurité en ligne comme hors ligne. Peter Kyle a donné l'exemple de la vérification d'âge pour certains services en ligne, un défi jusqu'à présent difficile à relever de manière fiable et sécurisée. Avec une pièce d'identité numérique officielle, cela deviendra beaucoup plus simple.
La France comme précurseur
Si cette initiative peut sembler novatrice, le Royaume-Uni n'est pas le premier à se lancer dans l'aventure de l'identité numérique. La France propose déjà depuis 2022 une application "France Identité" permettant de générer une version électronique de sa carte d'identité et de l'utiliser pour s'authentifier en ligne de façon sécurisée auprès des services publics et privés. Cette démarche s'inscrit dans le cadre du règlement européen eIDAS visant à créer un cadre pour l'identité électronique à l'échelle de l'UE.
Un chatbot IA comme assistant pour les démarches en ligne
L'autre grand projet annoncé par le gouvernement britannique est le développement d'un chatbot basé sur l'intelligence artificielle pour faciliter les interactions des citoyens avec les services publics en ligne, en particulier le portail GOV.UK qui regroupe l'ensemble des informations et démarches administratives. Nommé pour l'instant "chat-uk", cet agent conversationnel a été développé en partenariat avec OpenAI, la société à l'origine du célèbre ChatGPT.
"Il est vraiment important que le public commence à comprendre que, de plus en plus, dans un monde en ligne, et le gouvernement passe à un monde en ligne, nous interagirons à un stade plus précoce afin de pouvoir utiliser la puissance, la perspicacité et le volume d'interactions que le public peut fournir lors des tests", a déclaré Peter Kyle.
Le chatbot est déjà en phase de test auprès d'un panel d'utilisateurs lambdas afin de l'entraîner et de corriger d'éventuels bugs ou comportements inappropriés, comme cette fois où il s'est mis à parler en français en plein milieu d'une conversation ! Le secrétaire d'État assure cependant qu'aucun cas de "jailbreak" (où l'IA échappe au contrôle de ses concepteurs) ou de désinformation n'a été constaté jusqu'ici grâce à des tests poussés.
IA de confiance et investissements massifs
Cette initiative s'inscrit dans le cadre d'un plan plus large du gouvernement britannique visant à faire du pays un leader dans le domaine de l'intelligence artificielle, avec des partenariats avec les géants du secteur, des investissements massifs dans les infrastructures et la R&D, et un effort de développement d'outils IA dans les services publics. Baptisé "Humphrey", un assistant IA multifonction est ainsi en développement pour épauler les fonctionnaires dans leur travail quotidien.
Le Royaume-Uni entend cependant rester vigilant sur les enjeux de sécurité et d'éthique liés à l'IA, en particulier après avoir été à l'avant-garde du débat international sur ce sujet l'an dernier. Il s'agira de trouver le juste équilibre entre progrès technologique et nécessaire régulation pour faire émerger une IA digne de confiance au service des citoyens.
Un pari sur l'avenir
Avec ce grand plan de digitalisation de ses services publics, le Royaume-Uni mise clairement sur les technologies d'avenir comme l'intelligence artificielle et l'identité numérique pour bâtir une relation plus fluide et efficace avec ses citoyens. Aux commandes du premier budget depuis le Brexit, le chancelier de l'Échiquier Jeremy Hunt voit dans l'IA l'opportunité de "réinventer la façon dont fonctionne l'économie" et de "faire du Royaume-Uni la prochaine Silicon Valley". Permis de conduire dématérialisé et chatbot sont les premières briques d'un écosystème de services publics nouvelle génération qui pourraient bien préfigurer ce qui nous attend tous dans un futur proche.
Le pari semble en tout cas déjà en partie gagné au regard de l'autre côté de l'Atlantique, où les États-Unis semblent prendre un virage bien différent sous la nouvelle administration Trump. Le président fraîchement investi a en effet signé un décret abrogeant le cadre de régulation de l'IA mis en place par son prédécesseur et confiant les rênes de la politique technologique à Elon Musk, connu pour ses positions libertariennes en la matière. Deux visions qui s'affrontent et dont l'avenir nous dira laquelle s'avèrera la plus pertinente.