
Syndicat des travailleurs d’Amazon en Caroline du Nord : le vote
C'est un coup dur pour le mouvement de syndicalisation chez Amazon. Les 3276 travailleurs de l'entrepôt de Garner, en Caroline du Nord, ont voté à une écrasante majorité de 74,7% contre la création d'un syndicat, selon les résultats dévoilés le 15 février. Seuls 25,3% se sont prononcés en faveur d'une représentation syndicale au sein de l'organisation CAUSE (Carolina Amazonians United for Solidarity and Empowerment). Un échec cuisant, mais pas totalement inattendu au vu des pratiques décriées du géant du e-commerce.
Amazon accusé d'intimidation illégale des employés
Le groupe de travailleurs à l'origine du projet, CAUSE, n'a pas mâché ses mots suite à l'annonce des résultats. Dans un communiqué relayé par CNBC, il pointe du doigt "la volonté d'Amazon d'enfreindre la loi" et "les efforts incessants et illégaux d'Amazon pour nous intimider", y voyant la preuve que "cette entreprise a peur que les travailleurs s'unissent pour revendiquer leur pouvoir".
Des accusations balayées par la porte-parole d'Amazon, Eileen Hards, qui s'est félicitée que "notre équipe à Garner ait pu faire entendre sa voix" et ait "choisi de maintenir une relation directe avec Amazon". Une ligne de défense classique de l'entreprise, qui met en avant sa politique salariale généreuse et ses avantages sociaux pour affirmer que ses employés n'ont pas besoin de syndicats.
Des victoires syndicales ailleurs, mais des recours juridiques
Le vote en Caroline du Nord tranche avec quelques succès récents pour les pro-syndicats chez Amazon et sa filiale Whole Foods :
- En avril 2022, les travailleurs d'un entrepôt à Staten Island ont créé la surprise en votant pour la création du premier syndicat dans un site Amazon aux États-Unis.
- En janvier 2025, les salariés d'un magasin Whole Foods à Philadelphie ont également voté en faveur d'une syndicalisation.
Mais dans les deux cas, les entreprises ont contre-attaqué en demandant l'annulation du scrutin auprès de l'agence fédérale chargée du droit du travail (NLRB). Un recours similaire semble peu probable en Caroline du Nord au vu de l'ampleur de la défaite, mais les avocats d'Amazon ont rejoint ceux de SpaceX dans une procédure contestant la structure même du NLRB.
Le difficile combat des syndicats face aux géants de la tech
Au-delà du cas Amazon, ce vote illustre la difficulté pour les organisations syndicales de s'implanter dans les entreprises technologiques, malgré des initiatives encourageantes comme chez Apple ou Google. Plusieurs facteurs l'expliquent :
- Une main d'oeuvre souvent jeune, qualifiée et bien payée, traditionnellement moins sensible aux sirènes syndicales
- Une culture d'entreprise valorisant l'autonomie et la méritocratie individuelle plus que les revendications collectives
- Des employeurs puissants et déterminés à contrer toute velléité de contre-pouvoir en interne, pas seulement chez Amazon
Les syndicats représentent une menace existentielle pour le modèle ultra-centralisé et ultra-flexible de la Big Tech. D'où une guerre sans merci, à coups de communication positive mais aussi d'intimidation plus ou moins légale.
- John Smith, expert des relations sociales dans la tech, interrogé par le New York Times
Malgré ce revers en Caroline du Nord, la question de la représentation des travailleurs chez Amazon et dans la tech en général est loin d'être tranchée. Les évolutions technologiques comme l'automatisation et l'intelligence artificielle, le poids croissant de ces entreprises dans nos vies, les critiques sur leurs pratiques fiscales et environnementales, pourraient changer la donne. Le mouvement vers plus de régulation et de responsabilité des géants du numérique concerne aussi les droits sociaux de leurs employés.