Terzeo : Recycler les Terres Polluées en Île-de-France

Imaginez un endroit où les terres excavées, souvent considérées comme des déchets encombrants, se transforment en ressources précieuses. À quelques kilomètres de Paris, dans un coin discret de la Seine-et-Marne, une initiative audacieuse prend forme. Terzeo, fruit de l’alliance entre Colas et Clamens, ne se contente pas de traiter les sols pollués : elle les métamorphose en sable et gravillons, tout en repensant notre rapport aux déchets du BTP. Une révolution écologique et économique qui pourrait bien changer la donne.

Une Innovation au Cœur de l’Écologie Industrielle

À Isles-lès-Villenoy, à seulement 6 km de Meaux, un site flambant neuf émerge des friches industrielles. Avec un investissement colossal de **plus de 20 millions d’euros**, Terzeo n’est pas une usine comme les autres. Son ambition ? Offrir une solution complète pour gérer les terres polluées, principalement issues des chantiers de construction, en les valorisant à hauteur de 75 % tout en enfouissant les résidus inutilisables sur place.

Un Concept Tout-en-Un Unique

Ce qui distingue Terzeo, c’est son approche intégrée. Contrairement aux méthodes classiques qui dispersent les étapes de traitement, ce site regroupe tout : analyse, lavage, concassage et stockage. Les terres excavées arrivent, sont triées, nettoyées, puis transformées en matériaux réutilisables comme du sable (40 %) et des gravillons (35 %). Les 25 % restants, principalement de l’argile polluée, sont enfouis dans une zone dédiée.

« Ce qui est innovant, c’est de réaliser toutes les opérations sur un même site, y compris l’enfouissement, un élément clé du processus. »

– Amaury Cudeville, directeur de Terzeo

Cette centralisation réduit les coûts logistiques et garantit une **traçabilité irréprochable**, un atout majeur dans un secteur où la transparence devient cruciale. En prime, elle répond à un besoin criant : celui de sable et de granulats, ressources rares en Île-de-France.

Un Modèle Économique Doublement Gagnant

Terzeo ne se contente pas de résoudre un problème environnemental : elle en fait une opportunité économique. D’un côté, les entreprises du BTP paient pour déposer leurs terres, avec des tarifs ajustés selon le niveau de pollution et le potentiel de valorisation. De l’autre, les matériaux produits – environ **150 000 tonnes de granulats par an** – sont revendus, couvrant jusqu’à 3 % des besoins régionaux.

Ce modèle astucieux repose sur une synergie entre Colas, géant du BTP via sa filiale Tersen, et Clamens, une PME experte en terrassement. Jusqu’à 50 % des terres pourraient provenir des chantiers de Colas, assurant un flux constant de matières premières.

Un Processus Technique Sophistiqué

Entrons dans les coulisses de cette usine pas comme les autres. Chaque année, **200 000 tonnes de terres** franchissent les portes de Terzeo. Elles passent d’abord par un laboratoire pour une analyse rigoureuse basée sur 23 paramètres réglementaires. Ensuite, dans un bâtiment de 4 200 m², un ballet de machines entre en action : lavage pour séparer l’argile polluée, tri des éléments flottants, puis concassage pour produire sable et gravillons de différentes tailles.

Ce savoir-faire, peaufiné pendant six ans, s’appuie sur l’expertise de Clamens dans le recyclage des boues de béton. L’eau utilisée est traitée en circuit fermé via une station d’épuration, minimisant l’impact environnemental.

Un Passé Industriel Réinventé

Le site de Terzeo n’est pas né de nulle part. Construit sur une ancienne friche industrielle occupée jusqu’en 2002 par Beghin-Say (Tereos), il porte les stigmates d’une pollution à l’arsenic. Acheté en 2008, ce terrain a été réhabilité pour devenir un symbole de renouveau. Aujourd’hui, il incarne une transition réussie vers l’**économie circulaire**, où les déchets d’hier deviennent les ressources de demain.

Des Défis Locaux à Relever

Si l’idée est séduisante, elle n’a pas fait l’unanimité. En 2023, la commune voisine de Villenoy a tenté d’interdire l’accès aux camions de Terzeo, craignant des nuisances. Pourtant, les responsables insistent sur les bénéfices : en stockant l’argile sur place, ils limitent les transports et assurent un contrôle strict des déchets dangereux.

Classé comme **Installation de stockage de déchets dangereux**, le site respecte des normes drastiques. Sur trente ans, il prévoit d’enfouir 1 million de tonnes de résidus, un volume encadré par un arrêté préfectoral.

Impacts Économiques et Sociaux

Au-delà de l’écologie, Terzeo promet des retombées concrètes. À terme, jusqu’à **45 emplois** pourraient voir le jour, dynamisant une région marquée par la désindustrialisation. Et si le succès est au rendez-vous, d’autres sites pourraient essaimer, exportant ce modèle innovant ailleurs en France.

Voici un récapitulatif des chiffres clés :

• Investissement initial : plus de 20 millions d’euros.
• Capacité annuelle : 200 000 tonnes de terres traitées.
• Production estimée : 150 000 tonnes de granulats.
• Valorisation : 75 % des matières entrantes.

Vers un Avenir Plus Vert ?

Terzeo n’est pas qu’une prouesse technique : c’est une réponse aux enjeux du BTP moderne. Face à la raréfaction des ressources naturelles et à l’accumulation des déchets, cette initiative montre qu’il est possible de concilier rentabilité et respect de l’environnement. Mais son succès dépendra de sa capacité à convaincre les acteurs locaux et à s’intégrer durablement dans le tissu économique.

Et vous, que pensez-vous de cette transformation des terres polluées en opportunités ? Le futur du recyclage passe-t-il par des projets aussi audacieux ? Une chose est sûre : à Isles-lès-Villenoy, demain se construit dès aujourd’hui.