Hausse des impôts sur gains en capital au Canada : l’impact sur les startups
Cette semaine, le Parlement canadien a donné son feu vert à un projet de loi visant à augmenter le taux d'imposition sur les gains en capital, passant de 50% à 66%. Une nouvelle qui fait grincer des dents dans l'écosystème des startups et de la tech, qui craint un impact négatif sur l'investissement et l'innovation. Décryptage.
Les nouvelles mesures fiscales en détail
Concrètement, le projet de loi prévoit que le nouveau taux de 66% s'appliquerait dès le 25 juin pour les entreprises sur l'ensemble des gains en capital réalisés. Pour les particuliers, il concernerait les gains supérieurs à 250 000 dollars. Le gouvernement libéral justifie cette hausse par un souci d'"équité fiscale", arguant que les plus riches ne devraient pas payer proportionnellement moins d'impôts que la classe moyenne.
Le budget 2024 table sur des recettes supplémentaires de 19,4 milliards de dollars sur 5 ans grâce à cette mesure, qui toucherait environ 40 000 contribuables (0,13% de la population). En parallèle, l'exonération viagère sur les gains en capital passerait de 1 à 1,25 million de dollars. Et un nouvel incitatif pour les entrepreneurs canadiens réduirait le taux d'inclusion à 33,3% jusqu'à 2 millions de gains en capital sur toute une vie.
Des inquiétudes dans le secteur tech
Malgré ces garde-fous, la grogne monte dans l'écosystème tech. Pour Ben Bergen, président du Conseil Canadien des Innovateurs (CCI), cette hausse d'impôts « taxe l'investissement et l'innovation ». Le CCI, qui regroupe des centaines d'entrepreneurs et dirigeants de startups, a lancé une pétition appelant le gouvernement à abandonner le projet. Près de 2000 signatures ont déjà été récoltées.
Si le gouvernement voulait avoir une vraie discussion sur l'équité fiscale et les moyens d'augmenter les revenus pour financer les services publics, nous pourrions l'avoir en tant que pays. Mais ce n'est pas ce que propose la ministre Freeland.
Ben Bergen, président du CCI
Selon le CCI, de telles hausses d'impôts risquent de détourner des investissements dont les startups ont cruellement besoin, vers d'autres pays. Le Canada doit au contraire créer les meilleures conditions possibles pour la croissance de son écosystème d'innovation, plaident-ils.
L'opposition monte au créneau
Du côté politique, l'opposition conservatrice a voté contre la motion. Son chef Pierre Poilievre dénonce « un impôt tueur d'emplois qui va faire fuir des milliards de dollars d'investissements, de technologies et d'entreprises » hors du pays. La Fédération canadienne des entreprises indépendantes (FCEI) dit aussi sa déception, estimant que le gouvernement fait passer la politique avant l'équité fiscale.
À l'inverse, le gouvernement libéral assume pleinement son choix, martelant que les plus fortunés doivent payer leur "juste part". Un projet de loi détaillé sera déposé en juillet, pour un passage espéré à l'automne. Les débats promettent d'être animés, les enjeux étant majeurs pour l'avenir de l'écosystème tech canadien.
Quel impact réel pour les startups ?
À ce stade, difficile de prédire avec certitude les conséquences de cette réforme fiscale. Le nombre de contribuables touchés semble a priori limité. Mais beaucoup dans le secteur tech redoutent un effet dissuasif sur les investisseurs, dans un contexte économique déjà compliqué pour lever des fonds.
Certains entrepreneurs pourraient aussi être tentés de vendre leur startup ou de s'implanter sous d'autres cieux plus cléments fiscalement. Un risque que le gouvernement espère contrer avec ses incitations ciblées, comme l'exonération accrue. Mais les critiques doutent que cela suffise à compenser la hausse globale.
Une chose est sûre : l'écosystème des startups canadiennes suivra de très près l'évolution de ce dossier dans les prochains mois. Beaucoup appellent à un vrai dialogue avec le gouvernement, pour s'assurer que l'équation entre équité fiscale et soutien à l'innovation soit bien calibrée. L'avenir du secteur tech en dépend largement.
