
L’hydrogène dans les transports : un démarrage poussif malgré les promesses
Présenté comme le carburant miracle pour décarboner les transports, l'hydrogène semble marquer le pas. Malgré des investissements massifs et de grandes ambitions affichées par les industriels et les pouvoirs publics, son déploiement reste poussif dans la mobilité. Véhicules particuliers, utilitaires, camions, bus, trains... À chaque segment ses difficultés pour passer d'une technologie émergente à une véritable filière industrielle.
Un écosystème qui peine à émerger
Passées les effets d'annonce, le marché de l'hydrogène pour les transports peine à décoller réellement. "La filière prend plus de temps que prévu à émerger", reconnaît Christelle Werquin, déléguée générale de France Hydrogène. Les acteurs soulignent un manque de soutien et de visibilité de la part des pouvoirs publics.
Tout n'a pas été mis sur la table par rapport à ce qui avait été promis avec la stratégie nationale hydrogène de 2020. On devait la réviser en 2022 et on attend toujours.
– Christelle Werquin, France Hydrogène
De leur côté, les clients potentiels hésitent à franchir le pas face aux surcoûts et aux incertitudes qui demeurent sur cette technologie. Résultat, les commandes ne sont pas au rendez-vous et les industriels revoient leurs ambitions à la baisse.
Une place à trouver face à l'électrique
Autre défi majeur pour l'hydrogène dans les transports : trouver sa juste place face aux progrès fulgurants de l'électrification des véhicules. Initialement vu comme une solution pour les usages intensifs ou longue distance, là où la batterie montre ses limites, l'hydrogène voit son périmètre se réduire.
L'amélioration des performances et la baisse des coûts des batteries remet en question la pertinence de l'hydrogène sur certains segments comme les poids lourds ou le ferroviaire. Des acteurs emblématiques comme Alstom font face à des déboires techniques sur leurs premiers trains à hydrogène.
Des verrous à lever sur l'hydrogène vert et les infrastructures
Pour trouver son marché, l'hydrogène doit aussi lever deux freins majeurs. D'abord la question de l'hydrogène "vert", c'est-à-dire produit à partir d'électricité renouvelable. Aujourd'hui anecdotique, sa montée en puissance est un prérequis pour donner du sens écologique à cette motorisation.
L'autre enjeu clé est celui des infrastructures. Le réseau de stations hydrogène reste embryonnaire avec seulement 75 points de recharge ouverts en France mi-2023. Leur déploiement est ralenti par des coûts élevés et des incertitudes sur la demande.
Les équipementiers gardent espoir
Malgré ce contexte délicat, les équipementiers automobiles comme Plastic Omnium, Faurecia ou Michelin maintiennent le cap. Ils investissent massivement sur les réservoirs ou les piles à combustible, en quête de relais de croissance pour compenser le déclin annoncé du moteur thermique.
Des startups ambitieuses comme Hyvia, filiale de Renault dédiée à l'hydrogène, gardent aussi espoir malgré des débuts difficiles. Mais pour transformer l'essai, l'hydrogène devra d'abord convaincre les clients et trouver sa voie sur des marchés de niche.
La route est encore longue avant de voir l'hydrogène s'imposer dans le mix énergétique des transports. Les prochaines années seront cruciales pour savoir si les promesses se concrétisent enfin ou si l'électrique aura définitivement pris le dessus dans la course à la décarbonation de la mobilité.