
Startup : Les Leçons d’une Année Difficile en 2024
Alors que 2024 touche à sa fin, force est de constater que l'année écoulée a été particulièrement éprouvante pour l'écosystème des startups. Selon plusieurs sources, le nombre de jeunes pousses ayant dû mettre la clé sous la porte a atteint des sommets inégalés, dépassant même les chiffres déjà préoccupants de 2023. Un constat amer mais guère surprenant au vu de la frénésie d'investissements qui avait caractérisé les années 2020 et 2021. Aujourd'hui, alors que la poussière retombe, il est temps de tirer les leçons de cet épisode douloureux et de s'interroger sur les défis qui attendent encore les entrepreneurs en herbe.
Des valorisations irréalistes, des lendemains qui déchantent
Si l'on en croit les données de Carta, pas moins de 966 startups américaines ont baissé le rideau en 2024, contre 769 l'année précédente. Soit une hausse vertigineuse de 25,6%. Un chiffre d'autant plus frappant qu'il ne concerne que les entreprises clientes de la plateforme et ayant officiellement déclaré faillite. La réalité pourrait donc être bien pire. Du côté d'AngelList, on fait état d'une augmentation de 56,2% des liquidations. Paradoxalement, le site Layoffs.fyi évoque lui une baisse… qui s'explique sans doute par le fait que seules les fermetures publiques sont prises en compte.
Alors comment expliquer cette hécatombe ? Pour Peter Walker, responsable des analyses chez Carta, la réponse est simple :
L'hypothèse de travail est que les investisseurs n'ont pas été meilleurs pour repérer les gagnants en 2021. En fait, le taux de réussite pourrait même être pire cette année-là, étant donné la frénésie ambiante.
– Peter Walker, Carta
En clair : trop de financements accordés à la va-vite, sur la base de valorisations excessives et sans véritable due diligence. Il était donc logique qu'un nombre croissant de ces entreprises se retrouvent en difficulté quelques années plus tard, incapables de lever de nouveaux fonds pour financer leurs opérations. Un problème qui risque de perdurer, comme le souligne Dori Yona, PDG de SimpleClosure :
L'afflux rapide de capitaux a parfois encouragé des taux de consommation élevés et des mentalités de croissance à tout prix, conduisant à des défis de durabilité à mesure que les marchés changeaient après la pandémie.
– Dori Yona, SimpleClosure
Des secteurs plus touchés que d'autres
Si aucun domaine n'a été épargné, certains semblent avoir davantage souffert que d'autres. C'est le cas notamment des startups SaaS B2B, qui représentent à elles seules 32% des fermetures selon Carta. Suivent les entreprises orientées grand public (11%), la health tech (9%), la fintech (8%) et les biotechs (7%). Sans grande surprise, ce sont surtout les sociétés en phase d'amorçage qui trinquent, avec 74% des défaillances.
Des exemples emblématiques
Parmi les fermetures les plus marquantes de ce début d'année, on peut citer Pandion, une startup de livraison basée à Washington qui avait levé environ 125 millions de dollars en cinq ans. Ou encore EasyKnock, une proptech qui s'est brutalement éteinte en décembre dernier malgré 455 millions de financement. Deux illustrations parfaites de ces jeunes pousses au potentiel immense mais victimes d'une croissance mal maîtrisée.
Des leçons pour l'avenir ?
Alors que nous entrons dans la seconde moitié de la décennie, une question brûle toutes les lèvres : avons-nous tiré les leçons de cette sombre période ? Si la plupart des acteurs s'accordent à dire que le pire est passé, ils prédisent malgré tout encore de nombreuses fermetures pour 2025. Car en dépit du resserrement des cordons de la bourse, beaucoup de startups restent fragilisées par les excès passés. La route vers un écosystème plus sain et plus durable s'annonce donc encore longue et semée d'embûches.
Voici quelques pistes pour naviguer dans cette période troublée :
- Concentrez-vous sur votre product-market fit avant de chercher à tout prix la croissance.
- Adaptez en permanence votre business model à la réalité du marché.
- Visez la rentabilité plutôt que la course aux financements.
- Ne négligez pas la gestion de trésorerie et préparez-vous aux coups durs.
- Misez sur une croissance raisonnée et durable plutôt que sur une expansion à tout va.
Des conseils de bon sens qui, s'ils avaient été mieux suivis ces dernières années, auraient sans doute permis d'éviter bien des naufrages. Reste à espérer que cette douloureuse purge aura au moins le mérite d'assainir le secteur et d'ouvrir la voie à une nouvelle génération d'entrepreneurs plus prudents et avisés. Car au-delà des chiffres et des valorisations folles, n'oublions pas que derrière chaque échec se cachent des rêves brisés et des vies bouleversées. Un terrible gâchis humain qui doit tous nous interpeller.