
La fin de Photowatt, un coup dur pour l’industrie solaire française
C'est un coup de tonnerre dans l'industrie solaire française. Photowatt, l'un des derniers fabricants nationaux de panneaux photovoltaïques, va définitivement cesser son activité. Faute de repreneur, le site de Bourgoin-Jallieu en Isère et ses 162 salariés vont devoir tourner la page, après des années de lutte pour survivre face à la concurrence chinoise. Un nouveau revers pour la filière photovoltaïque nationale, déjà fragilisée.
Photowatt, un fleuron du solaire français en difficulté
Filiale d'EDF, Photowatt faisait figure d'acteur historique sur le marché du solaire en France. Mais l'entreprise accumulait les pertes depuis plusieurs années, de l'ordre de 20 à 30 millions d'euros par an selon sa maison-mère EDF Renouvelables. Malgré plusieurs plans de sauvetage et une reprise en main par EDF en 2012, Photowatt n'a pas réussi à redresser la barre, souffrant de plein fouet de la guerre des prix avec les géants asiatiques.
Son usine de Bourgoin-Jallieu, dernière unité de production de wafers et de panneaux solaires de l'Hexagone, tournait ainsi au ralenti ces derniers mois. Un comité social et économique extraordinaire a été convoqué le 4 février pour acter la fin de l'aventure et négocier le sort des salariés. Un symbole douloureux pour l'industrie solaire française.
L'espoir déçu du projet de reprise par Carbon
Un temps, l'offre de reprise portée par la start-up Carbon avait suscité l'espoir d'un avenir pour le site isérois. Cette jeune pousse lyonnaise, portée par d'ambitieux projets dans le solaire, se disait prête à investir 40 millions d'euros pour moderniser l'outil et l'intégrer dans sa future gigafactory de Fos-sur-Mer.
Las, en novembre dernier, Carbon a finalement jeté l'éponge, officiellement en raison d'un désaccord sur le calendrier de reprise avec EDF. Les salariés, eux, émettaient des doutes sur la solidité du projet face aux défis industriels et financiers d'un tel redémarrage. Le feuilleton Photowatt se referme donc sur un échec.
Les raisons d'un naufrage industriel
Comment en est-on arrivé là? Comme bien d'autres acteurs européens, Photowatt a subi de plein fouet la vague de fond de la concurrence chinoise sur les panneaux photovoltaïques. Depuis 15 ans, les fabricants asiatiques imposent leurs lois sur un marché devenu une commodité, trustant aujourd'hui 90% de la production mondiale, contre 1% pour l'Europe. Face aux coûts imbattables de la Chine, difficile pour les Européens de lutter à armes égales.
« On ne peut pas être compétitif avec une main d'oeuvre dix fois moins chère, des normes environnementales et sociales light et des subventions massives »
Un ancien cadre de Photowatt
Certains plaident aussi les erreurs stratégiques d'EDF, avec un positionnement brouillé entre production et installation, ainsi que le manque de soutien public face à cet enjeu de souveraineté énergétique et industrielle. "L'Europe a manqué le virage de la révolution solaire, et les pouvoirs publics ont laissé tomber cette filière", déplore un observateur.
Vers une relance de la filière solaire nationale ?
La disparition de Photowatt sonne-t-elle le glas de l'industrie solaire française? Si le coup est rude, des raisons d'espérer subsistent. De nouveaux acteurs émergent, à l'image de Carbon et ses projets de gigafactories à Fos ou à Hambach, ou de Voltec Solar et sa future méga-usine alsacienne.
Des projets innovants aussi, sur les cellules de nouvelle génération comme le Français Rosi Solar. Une filière amont du recyclage se structure. Et les récents plans de soutien à la filière photovoltaïque, via France 2030, semblent dessiner un environnement plus porteur.
Mais pour réussir son comeback dans la course mondiale du solaire, la France devra passer à la vitesse supérieure, en pariant sur l'innovation, la montée en compétences et un cadre réglementaire et fiscal compétitif. Face à l'urgence du défi climatique, il faudra une véritable volonté politique pour bâtir les champions de demain. La partie n'est pas gagnée, mais elle mérite plus que jamais d'être jouée.
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